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  • : La vie au labo
  • : Les pensées - j'ose le mot- diverses d'un jeune scientifique ayant obtenu un poste académique à l'Université, après presque trois années en post-doctorat dont deux au fin fond du Massachusetts. Ca parle de science (un peu) mais surtout du "petit monde" de la science. Et aussi, entre autres, de bouffe, de littérature, de musique, d'actualité, etc. Et de ma vie, pas moins intéressante que celle d'un autre.
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21 octobre 2014 2 21 /10 /octobre /2014 16:16

Quelques mots (énervés) rapides suite à une petite vexation récente.

 

Après avoir écrit et déposé un projet pour une bourse ministère, l'avoir défendu, avoir fait des compromis, avoir été sélectionné, avoir auditionné puis recruté le doctorant, bataillé pour qu'il ne nous claque pas entre les doigts alors qu'on lui demandait toutes les 2 semaines de remplir 10 pages de documents ou de renvoyer pour la 6ème fois sous 48h (par mail) son nom, son prénom, et son adresse mail tout en lui expliquant qu'il ne signerait pas son contrat avant le 1er octobre, bref, après tout ça, la secrétaire de l'école doctorale, suite à un échange de mails, m'écrit "ah mais vous faites partie de l'encadrement aussi, faut que je vous rajoute alors?".

L'explication, pour ceux qui n'ont pas saisi, est que je n'ai pas la HDR. Que j'ai beau avoir conçu le projet, qu'il ait été jugé assez bon pour être sélectionné (peut-être pour des raisons discutables, mais finalement pas plus que celles pour lesquelles d'autres projets sont rejetés), on ne m'estime pas capable d'encadrer un étudiant sans un chaperon. Et que, pour l'administration (sans blâmer la dite secrétaire qui ne fait que refléter la perception commune), c'est ce chaperon qui est le vrai boss, le vrai smartass, tandis que moi je ne suis qu'un petit puceau de la science qui 10 ans plus tard a toujours besoin qu'on lui explique la vie. Dans certaines écoles doctorales, on estime même que le directeur HDR ne peut pas être à moins de 50% de taux d'encadrement, même si dans la réalité tout le monde sait que les prête-noms, ça existe, et que leur contribution consiste à voir 3 fois le thésard en 3 ans. 

 

Je pourrais vivre avec ce genre de choses si on fonctionnait encore comme il y a 20 ans. Avec des équipes pyramidales, des jeunes padawans entourant un senseï, le vieux étant censé apporter aux jeunes son expérience, mais aussi son réseau, son pognon, et se coltiner les emmerdes administratives, le grant writing etc.

Maintenant qu'on nous bassine avec l'excellence, avec les primes individuelles, avec la recherche de pognon tous azimuts par appels à projets, où seul le coordinateur ou le partenaire responsable compte, où tout est prétexte à être foutu sur le CV pour montrer à quel point on est individuellement brillant, je trouve ça insupportable.

Je trouve ça insupportable que l'administration exige que j'ai la permission de mon "chef d'équipe" ou "chef de labo" qui n'a rien à voir avec le projet pour aller en conférence avec les crédits d'une ANR dont je suis le porteur. Je trouve ça insupportable qu'on exige que je sois "encadré" pour mener à bien des projets qu'on me pousse souvent à écrire seuls.

 

Donc soit on (les chercheurs et l'administration) accepte qu'on a bien entamé une transition vers un système "individualiste" à l'américaine, et on arrête de faire chier les jeunes: on les laisse déposer les projets qu'ils veulent où ils veulent, recruter, encadrer, gérer le pognon qu'ils ont ramené. Soit on n'assume pas, on revient vers un système plus hiérarchisé mais dans ce cas là, qu'on m'enlève les emmerdes administratives, qu'on n'exige pas que je ramène 150k€ par an, et donc qu'on me laisse faire ma recherche moi-même, peinardos avec mes petites mains, sans avoir à monter mon groupe et à faire le "manager".

Mais comme d'habitude, personne ne semble vraiment vouloir choisir et on reste donc dans cet entre-deux merdique, où le jeune est un vieux comme les autres mais pas tout à fait. 

 

Sur des thématiques vaguement connexes (mais qui ont inspiré ce billet), voir:

le dernier billet de Gaia, l'avant dernier billet de D. Monniaux, et le dernier billet de Tom Roud (qui fait un peu écho à un vieux billet à moi, si je puis me permettre)

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commentaires

A
Tu es recruté chercheur/MCF et tu dois encore passer un diplôme pour prouver que tu sais diriger ta recherche et que tu peux encadrer et former des étudiants. On se demande donc bien sur quels critères les chercheurs/MCF sont recrutés.........<br /> <br /> L'HDR ne devrait pas exister, elle ne sert qu'à remplir les caisses de la Fac......
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M
Je suis assez d'accord avec Alexis.<br /> <br /> En détaillant un peu:<br /> <br /> Un recrutement (dans le public comme dans le privé), c'est un pari (dont les modalités pourraient être améliorées mais c'est un autre débat): dans la recherche, le pari porte sur le fait que le recruté va produire des résultats, les publier, ramener de l'oseille, former, faire tourner la boutique d'une façon ou d'une autre d'un point de vue &quot;administratif&quot;, et en sus pour les EC enseigner.<br /> Il n'est pas rare que tout ou partie du pari ne soit pas tenu, où que tout le monde ne soit pas ultra-doué dans tous les domaines.<br /> Il n'empêche, quand on fait le pari, on part du principe qu'il est gagnant, pas du principe qu'il est perdant, eg que le mec qu'on a recruté est nul en tous points.<br /> Qu'il y ait des évaluations sur tout ou partie des critères, avec des impacts sur la carrière, je suis pour, et ils existent déjà sous plein de formes (évaluations AERES ou du CNRS pour ses employés, comités de suivi de thèse, primes &quot;d'excellence&quot;, de plus en plus &quot;sondages&quot; des étudiants comme aux US...). On peut certainement améliorer ces évaluations et/ou les &quot;sanctions&quot; en cas de manquements graves.<br /> <br /> Par contre je ne vois pas l'intérêt d'un &quot;examen&quot; de &quot;qualification à l'encadrement&quot;. On n'imagine pas un &quot;examen&quot; de &quot;qualification à l'écriture de papier&quot;. Pourtant des gens sont doués pour ça, d'autres beaucoup moins. <br /> D'un point de vue conceptuel, ça se place dans toute cette veine de &quot;contrôle a priori&quot; qu'on affectionne dans l'esr (comme la qualif, les om visés par 5 personnes etc), qui, sous couvert de &quot;démasquer&quot; les 5 ou 10% de cas problématiques, ne règlent pas grand chose et instaurent un climat de suspicion généralisée déplorable.<br /> D'un point de vue pratique, je pense aussi que cela impliquerait de qualifier ce qu'est un bon encadrement, et de ce point de vue là, même au sein d'une équipe on n'est pas forcément d'accord. cf ce que j'avais écrit ici: http://laviedemix.over-blog.com/article-de-l-encadrement-119972510.html<br /> <br /> Bon, voila, du coup, j'ai plus qu'à recopier ce comm' et j'ai mon 2ème article...
A
Dans ce cas là, comme tu n'as pas le droit d'en encadrer tant que tu n'as pas d'HDR, comment tu prouves que tu en as les capacités ?<br /> <br /> Ce que je veux dire c'est que pour moi, être recruté fait partie d'un packaging : publications, expertise dans un domaine/dans une/des technologies, capacité à gérer un sujet de recherche, à trouver des financements et capacités à encadrer/former des étudiants/transmettre un savoir. <br /> <br /> On sait tous qu'avec un jury de copains, un manuscrit avec tous tes articles et tes projets en cours, hop l'HDR est dans la poche.....<br /> <br /> Donc faire une autre soutenance après thèse, post-doc, concours, je trouve ça too much.<br /> <br /> Chacun devrait pouvoir encadre un premier étudiant. Si ça se passe mal pour X raisons, on devrait te l'interdire. Si ça se passe bien, tu peux recommencer. Pas besoin d'un autre diplôme pour ça.
F
Alexis: si je suis ta logique jusqu'au bout, on ne devrait pas recruter de CR/MCF avant qu'ils n'aient eu l'occasion d'encadrer des thésards, de manière à pouvoir en juger lors du recrutement ? Ça me semble un remède pire que le mal.
M
Pour revenir au sujet de la HDR et de la vision du &quot;jeune chercheur&quot;, que penser des conseils bien informés du genre &quot;mets un DR/PU sur ton ANR JCJC, ça aura plus de chances de passer&quot;. <br /> La JCJC c'est un pari sur la capacité à un jeune chercheur à mener à bien un projet en &quot;autonomie&quot;, ou une &quot;transmission&quot; encadrée du savoir d'un vieux sage à un jeune naïf (ou au minimum un &quot;accompagnement bienveillant&quot; d'un petit jeune vers l'excellence)? <br /> Je vois ça plutôt comme la 1ère explication (et beaucoup de jeunes aussi), mais visiblement tout le monde (surtout chez les vieux, et donc probablement ceux qui sélectionnent) n'est pas d'accord.
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J
Les ordres de mission sont toujours signés par le chef d'établissement et par délégation, le directeur de labo.
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R
@Mix, a propos de la signature du supérieur hiérarchique... =&gt; je peux vous assurer que c'est une règle purement interne à votre labo. <br /> <br /> &quot;je ne comprends pas très bien pourquoi on laisse la possibilité à quelqu'un d'autre que moi, de pas impliqué dans le projet, de décider ce dont j'ai besoin pour mon projet&quot;. =&gt; très simple: car on ne vous fait pas confiance (je pense que c'est général: les universitaires ne se font pas confiance).
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M
interne à mon labo, non. A ma tutelle, sans nul doute, mais il n'empêche (je suppose qu'elles en ont toutes quelques unes)
R
Je trouve votre billet très intéressant. Effectivement, a priori celui qui écrit un projet de recherche, et qui en obtient un financement, est a priori apte à le conduire et donc à diriger les travaux. Mais il faut quand même avouer que cette pratique (de demander aux jeunes d’aller pêcher des sous) est encore assez récente. Compte tenu de l’inertie de notre système, il faudra encore au moins 30 ans pour qu’on adapte nos règles. <br /> <br /> Une conclusion : vite passer son HDR. <br /> <br /> Enfin, une remarque de vocabulaire : une bourse du ministère ça n’existe pas. Là encore c’est un vieux réflexe du temps passé. Aujourd’hui on dit « une allocation de l’université » (double nuance, et les deux sont de taille).
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M
Je vois que j'ai affaire à des spécialistes. désolé de mes imprécisions linguistiques (cela dit, à l'époque des &quot;bourses ministérielles&quot;, j'avais aussi un contrat, un salaire et les cotisations inhérentes en tant que cdd de la fonction publique). <br /> Enfin bref, dans le cas auquel je faisais spécifiquement allusion, il s'agit d'un contrat doctoral de l'école doctorale machin affectée à une école d'ingé, le pognon vient du ministère et la rémunération est celle, minimale, d'un ex-allocataire de recherche du ministère, eg en gros 1400€ net mensuels.
A
Si c'est un contrat doctoral, on ne parle plus de bourse ou d'allocation, mais de salaire. Juridiquement, c'est un salaire. Que ce qui permette de financer ce salaire soit une allocation ou une bourse régionale, départementale, ou une dotation d'entreprise ne change rien à l'affaire… Le contrat doctoral est un contrat de travail à durée déterminée.
M
Ah, merci pour ce comm', Rachel (on vous voit peu ailleurs, me semble-t-il, mais il y a déjà beaucoup de discussions à gérer chez vous, ici c'est plus calme).<br /> <br /> Sur l'inertie, je suis hélas on ne peut plus d'accord.<br /> <br /> Pour le vocabulaire, oui, excusez-moi, bien que pas si vieux, j'ai moi-même eu une bourse ministère. En l'occurrence il s'agit d'un &quot;contrat doctoral&quot; dans l'école d'ingénieurs où l'histoire se passe, si je ne m'abuse.