Nos doctorants dépendent d'une école doctorale sur laquelle j'ai, en tant que chercheur, beaucoup à redire notamment au niveau de la modernité des conceptions de ce qu'est la recherche.
J'avais déjà eu quelques problèmes à l'époque où nous avions accueilli pendant 1 an un étudiant américain dans le cadre d'une cotutelle, que je peux rappeler ici:
- on m'avait envoyé un canevas pour la rédaction de la convention de cotutelle, en m'expliquant que c'était à moi d'établir le document. Quand j'avais osé prétendre que ça ne me semblait pas être mon travail, la gestionnaire m'avait répondu que ce n'était pas le sien non plus. Pendant deux mois, je lui ai donc envoyé des versions du document, qu'elle me renvoyait annotées pour corrections (je pense que le faire elle-même lui aurait coûté in fine, beaucoup moins d'efforts).
- on m'avait expliqué qu'être co-encadrant de la thèse avec un Full Prof américain (juste pour expliquer que ce n'est pas un perdreau de la veille, je signale que son h-index > 50) ne suffisant pas, mais qu'il fallait quelqu'un avec la HDR. Si si. On a donc rajouté un troisième larron qui, si je veux être objectif, n'a pas énormément apporté au projet (je reste sobre). J'aurais pu m’accommoder de ça si on ne m'avait pas en sus expliqué avec condescendance que rien de tel qu'être chaperonné pour progresser.
Je vous passe les détails des discussions concernant la durée de la thèse ("ah bon la thèse ne fait pas partout 3 ans 0 mois 0 jours 0 heures? ah ben ça va pas être possible alors. Allez, si, mettez des fausses dates et puis c'est tout").
J'avais également été quelque peu irrité de m'entendre dire qu'on m'avait "oublié" dans l'encadrement d'une autre thèse dont j'étais le véritable porteur (voir ailleurs).
Et puis récemment, j'ai parcouru les documents transmis aux étudiants et encadrants concernant les modalités de rédaction du mémoire et de soutenance pour la thèse, et j'y ai lu des perles hallucinantes (à mon sens).
Par exemple:
" Le mémoire est en français (sauf accord si convention de cotutelle*).
Si pour des raisons autres que « pour donner plus de visibilité à ma thèse » (car pour cela il y a les publications), le doctorant souhaite écrire son mémoire en anglais, celui-ci doit en faire la demande"
Mais aussi, dans le cas d'une thèse par articles
"Le doctorant doit être l’auteur principal des articles" et encore "Hors les articles le cas échéant, la thèse doit être rédigée en français sauf si une dérogation de rédiger en langue anglaise a été accordée"
Actuellement, j'ai un doctorant qui est sur un projet assez ambitieux et légitimement "trop gros" pour lui. Dans le cadre de son projet de thèse, il y aura probablement 2 papiers qui sont le fruit de stages de master effectués en parallèle de son travail principal et en partie sous sa supervision. L'un de ses articles est déjà paru, et comme le stagiaire de master a été très bon et a finalement quasiment produit toutes les manipes que nous analysons, il m'a semblé légitime de le mettre en premier nom, le doctorant étant 2ème nom. Selon ce "règlement", ce papier ne devrait pas être introduit dans la thèse, ce qui serait une hérésie, à mon sens.
Bref, je suis assez remonté contre notre école doctorale. Le fonctionnement me semble relever très clairement du fonctionnement français "d'avant", qui perdure encore par endroits mais n'est plus du tout en phase avec les évolutions actuelles (de financement, d'encadrement, de recrutement etc). Je m'abstiendrai de faire le lien avec le CV du directeur de l'ED, et avec la qualité globale scientifique de notre établissement. Je dirais simplement qu'on se croit bien meilleurs qu'on ne l'est.
* Nota: dans le cadre de la cotutelle dont je parle plus haut il avait été exigé que 50 pages au moins soient en français. Ce que nous avions réussi à réduire, après moult tractations, à 20.