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  • : La vie au labo
  • : Les pensées - j'ose le mot- diverses d'un jeune scientifique ayant obtenu un poste académique à l'Université, après presque trois années en post-doctorat dont deux au fin fond du Massachusetts. Ca parle de science (un peu) mais surtout du "petit monde" de la science. Et aussi, entre autres, de bouffe, de littérature, de musique, d'actualité, etc. Et de ma vie, pas moins intéressante que celle d'un autre.
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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 13:28

Petite suite à ma tentative de décryptage de ce qu'est l'influence dans la blogosphère, notamment dans le milieu finalement encore assez old school qu'est la restauration.

Cela fait également écho à mes récents "pastiches" de blogs gastros. 

 

En effet, un certain nombre de requêtes hebdomadaires conduisant au foutoir qu'est ce blog portent sur cette question fondamentale "comment écrire une bonne critique gastronomique?". 

Je n'ai pas la prétention d'avoir la réponse, mais mon vrai métier consistant à être le moins possible perméable au bullshit marketeux (conscient ou inconscient, d'ailleurs), je sais un peu repérer les "tics de langage" et autres que l'on retrouve dans bien des blogs connus dans le milieu ou en voie de l'être.

A priori, 250 lecteurs quotidiens feront de vous l'un des blogs en vue dans le domaine de la critique gastro amateur, tous les espoirs sont donc permis... votre petit blog pas influent à 50 ou 100 lecteurs quotidiens n'est pas si loin de casser la baraque.

On me répondra que je ne suis qu'un petit aigri qui aimerait bien être calife à la place du calife; cela n'est peut-être pas totalement faux, bien que je ne sois pas en mesure de juger toutes les raisons inconscientes qui me font faire ce que je fais; et puis ça fait probablement trop longtemps que je suis sur le marché pour que ma carrière de blogueur change radicalement aujourd'hui.

Mais de façon plus générale c'est aussi une façon de pousser un cri "aaaaahh" contre les auto-proclamés experts, qui, à défaut d'avoir vraiment quelque chose de pertinent à raconter, maîtrisent suffisamment bien le "personal branling" pour devenir "visibles" et par suite "incontournables" aux yeux du monde*. 


Aujourd'hui donc, quelques clés pour rédiger une critique de resto (parisien) de façon sexy et accrocheuse, sur le mode "n'écrivez pas [...], écrivez plutôt [...]"

 

 

- je suis rentré là parce que je passais devant et je savais pas où bouffer = cela faisait longtemps que je passais devant et la carte m'avait intriguée, j'ai donc décidé de le tester

Le blogueur influent ne dépend pas du hasard.

 

 

- j'habite ou je bosse dans le quartier et j'y bouffe toutes les semaines parce que je suis fainéant et c'est pas mal = la perle cachée du quartier (ne pas hésiter à multiplier les critiques)

Le blogueur influent ne va pas dans un endroit pour de basses raisons pratiques, il a un agenda. Et il sait optimiser ses articles.

 

 

- je ne connais pas ce quartier, je n'y vais jamais = l'offre gastronomique dans ce quartier est assez pauvre

Le blogueur influent connaît tous les recoins de Paris. S'il ne va jamais dans un quartier, ce n'est pas parce qu'il habite ou bosse à l'autre bout de Paris, c'est parce qu'il sait qu'il n'y a rien à y faire, rien à y découvrir.


 

- j'ai lu sur un blog (ou le Figaroscope) = on m'a recommandé

Le blogueur influent a des réseaux mystérieux. Qu'il ne cite jamais.

 

 

- Pudlowski en a parlé = j'ai su qu'un nouveau restaurant venait d'ouvrir

- le Fooding en a parlé = j'ai su qu'un nouveau restaurant commençait à buzzer

- le Fooding et le Figaroscope en ont parlé =  la nouvelle sensation du moment à Paris

- tous les blogs en ont parlé = la perle où il est impossible de réserver

Le blogueur influent ne choisit pas ses restos comme vous et moi. Il sait.

 

 

- c'était bon = les saveurs explosent en bouche

Le blogueur influent maîtrise les expressions comme un professionnel.

 

 

- quelques petits trucs ont été améliorés depuis ma précédente visite = le restaurateur a sûrement lu mon article et mes réserves et a su rectifier le tir

Le blogueur influent ne doute de rien, et pense (ou fait mine de) qu'un restaurateur sur la place depuis 20 ans a besoin de ses conseils de business model. L'important c'est que le lecteur finisse par le croire aussi.

 

 

- j'ai réussi à choper par miracle une invitation au pince-fesses machin = j'ai été sollicité pour participer à la réunion de lancement machin

Le blogueur influent ne demande rien, on lui donne, et il accepte. Et en aucun cas il n'est sur la 3ème liste d'une opération miteuse... 

 

 

- je me suis fait inviter = je n'accepte jamais les invitations

Le blogueur influent est incorruptible. Sauf cas de force majeure.

 

 

- j'y suis allé 40 fois parce que c'est ze place to be et j'ai un standing = les autres adorent mais je suis plus circonspect

Le blogueur influent se démarque. 

 

 

 

P.S.: Il y en a sûrement beaucoup d'autres, n'hésitez pas à nous en faire profiter en commentaires    

 

 

* pour baigner un peu dans l'associatif depuis quelques mois, je m'aperçois avec tristesse que l'"expertise", quel que soit le domaine, s'acquiert d'abord, de l'extérieur, parce qu'on gesticule pour se faire entendre, qu'on réseaute ou quelle que soit la façon dont vous appelez ça, et ensuite éventuellement parce qu'on a des choses intéressantes à dire. Et donc autant on peut acquérir une certaine renommée en n'apportant aucune plus-value intellectuelle, autant on ne deviendra jamais quelqu'un d'écouté si on refuse de jouer le jeu ou de comprendre ces "codes de la branlette". Il y a des gens qui font ça très naturellement et sans penser à mal, d'autres suffisamment cyniques pour s'en foutre, moi j'ai toujours un peu l'impression de m'astiquer le poireau en public, et je ne suis donc jamais très à l'aise dans l'exercice. Même si je le fais d'assez bon gré dans le cadre de mon métier (conférences, articles etc), c'est un peu différent lorsqu'il s'agit, après tout, d'un "hobby".

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commentaires

D
<br /> Salut Mix,<br /> <br /> <br /> je comble doucement mon retard de lecture, tout ça pour apprendre que je n'ai pas toutes les tares, pardon, les qualités d'un blogueur influent !! ben merde alors, moi qui pensait qu'en portant<br /> le tee-shirt de mon blog dans tous les restos, le cuistot me reconnaitrait et me dédicacerait le plat, que les foules se précipiteraient dans tous les restos "découvert par mes soins au hasard<br /> après en avoir entendu parler par des connaisseurs, où les saveurs explosent en bouche dont le cuistot a pris en compte mes remarques, pardon, mes conseils judicieux"... je retourne à mon<br /> anonymat crasseux de blogueur sans talents... #depression #aigri #frustré<br />
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M
<br /> <br /> Allez doc,<br /> <br /> <br /> Il faut se consoler ou se motiver en se disant qu'on est encore plus prêt d'être influent un jour que Wahrol ne le pensait. <br /> <br /> <br /> Bientôt à nous les honneurs d'un guide à notre noms, les "n'y allez pas de la rive gauche".<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Mon expérience avec les médias est également qu'ils exigent une forte disponibilité : le plus souvent, on t'interroge pour avoir une réaction rapidement ; du style on t'appelle à 10h du matin<br /> pour un truc qui doit passer au 13h, en te demandant de réagir à un document que tu n'as pas et que le journaliste n'a pas lu.<br /> <br /> <br /> Les exigences de formatage : on t'interroge sur un sujet à la fois sociétal et scientifique, qui appelle une réponse nuancée et construite, puis on t'explique qu'il faut une réponse oui/non en<br /> moins de 30s à une question non pertinente mais formatée selon les critères des journalistes.<br /> <br /> <br />  <br />
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M
<br /> <br /> Mes expériences se limitent à quelques "tribunes" écrites, je n'ai pas eu les honneurs des media télé :); on retrouve ces problèmes, en version moins contraignante... ("merci de réduire votre<br /> tribune de 3000 mots à 5000 caractères", "ben oui mais du coup la nuance en prend un coup" "on s'en fout, si vous voulez on le fait nous-même" "non c'est bon...")<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Oh, cela fait un bout de temps que je me dis que, pour passer dans les médias, avoir un truc intéressant à dire est moins important que<br /> <br /> <br /> 1) entretenir son réseau<br /> <br /> <br /> 2) savoir produire un contenu formaté par rapport aux demandes des gens susceptibles d'inviter<br /> <br /> <br /> 3) être passé dans d'autres médias (fainéantise : on invite les gens qu'on a vu ailleurs).<br />
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M
<br /> <br /> C'est toujours un peu frustrant quand on y est confronté "pour de vrai" (quand on cherche à publiciser un point de vue qu'on pense objectivement pertinent, notamment pour sortir du point de vue<br /> 2)).<br /> <br /> <br /> J'ai l'impression que les media sont prêts à publier des trucs intéressants, mais que l'"énergie d'activation" est énorme... en gros, il faut trouver un contact, le harceler, etc; ou alors,<br /> "faire le buzz" pour une raison pas vraiment contrôlable (exemple de Coulmont avec les prénoms).<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> La raison 3) est pertinente et je la vois de plus en plus autour de moi: les industriels qui invitent toujours les mêmes "experts" depuis 30 ans ou qui te contactent même sur des sujets très loin<br /> de ton travail parce qu'ils t'ont connu par ailleurs... les collaborations entre chercheurs sont parfois aussi basées sur de telles constructions...<br /> <br /> <br /> <br />