Vincent Berger, rapporteur des Assises de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche qui se tiennent en ce moment (et qui passent me semble-t-il largement inaperçues au sein du "petit personnel" des laboratoires), a fait une première synthèse des contributions de plus de 85 organisations.
Dans celle-ci, il remarque notamment que la "complexité du système est déplorée de toute part". "Toutes les personnes auditionnées pointent le coût en argent et en temps, et les difficultés juridiques et administratives paralysantes."
D'autres que moi ont souligné qu'il était bien temps que quelqu'un s'en rende compte.
Mais je vais aller plus loin.
M'inspirant de nos politiciens, j'apporte une solution simple à un problème complexe.
En effet, récemment, M. Bartolone, l'homme qui n'a pas embauché sa femme mais épousé sa collaboratrice, a décidé de moraliser les pratiques financières de l'Assemblée Nationale, dans une série de mesures saluées par la presse (de gauche).*
Toutefois, il a expliqué qu'il n'irait pas jusqu'à demander aux députés de justifier par factures les dépenses effectuées dans le cadre de l'IRFM (indemnité représentative de frais de mandats, 6412€/mois), se contentant d'une "déclaration sur l'honneur", notamment parce que cela serait une mesure "trop lourde en personnel".
Je suggère donc humblement que l'on fasse exactement pareil pour les dépenses d'équipes ou de laboratoire dans l'ESR.
Une simple déclaration sur l'honneur pour pouvoir, sur les contrats dont nous disposons, partir en congrès, acheter du matériel sans se faire chier à savoir si c'est du fonctionnement ou de l'équipement, recruter des étudiants ou contractuels sans avoir à faire valider le moindre mouvement d'oreilles par 12 services différents qui de toute façon ne contrôlent rien puisqu'ils signent 600 papelards par jour (chiffre qui m'a été avancé par la DRH de mon institut).
Bizarrement, je doute qu'une telle mesure fasse l'unanimité, tant dans la classe politique que dans l'opinion publique.
Et pourtant, l'argent (le plus souvent public lui aussi, mais pas toujours) que nous essayons tant bien que mal de dépenser pour mener nos recherches n'est pas contrairement à l'IRFM un acquis mensuel, c'est celui que nous sommes allés chercher "avec les dents", en remplissant des appels à projets à 15% de taux de réussite et évalués par des spécialistes du domaine, en faisant la danse du ventre devant des industriels etc.
A priori donc, de l'argent qu'on va vraiment utiliser pour faire de la recherche et pas pour aller à la Tour d'Argent, d'autant plus que nous sommes aussi évalués, même indirectement, a posteriori sur la réussite de ces projets (articles publiés, devenir des étudiants, réputation faite par les collègues etc).
* PS: Le très bon M. Bartolone, symbole du renouvellement de la classe politique française (député depuis 1981), s'est depuis justifié, en expliquant qu'il n'appliquerait pas les directives de Bruxelles interdisant à un élu d'embaucher quelqu'un de sa famille "Ca irait trop loin. Ce sont la qualification et le parcours d'une personne qui doivent être pris en compte dans une décision d'embauche".
Outre le fait qu'on puisse douter que seule Mme Bartolone est compétente pour être "chargée de mission interventions et droits des femmes", j'y vois vraiment la preuve que nos politiques vivent dans un monde déconnecté de toute réalité, où des règles simples d'éthique appliquées un peu partout dans la société française voire européenne sont perçues comme "aller trop loin", bref des atteintes fondamentales à leur liberté de claquer l'argent public sans rendre de comptes.