Plutôt qu'une réflexion, deux interrogations au sujet de l'"affaire" Jean-Jean et de la douche à 200000 euros. Comme disait un pote, ça laisse toujours un goût amer. Ou bien une petite démangeaison anale. Mais surtout:
- Je me demande en fait si ce genre d'"abus de pouvoir", "népotisme", "abus de bien sociaux" ou whatever, s'est vraiment multiplié. Je n'en suis pas sûr: je pense que ce sont plutôt les sources d'informations qui ont été décuplées. Les media alternatifs, qui certes racontent aussi beaucoup de conneries, ont sans doute quand même contribué à sortir un peu le journalisme français de sa léthargie.
Auparavant, seul le Canard sortait ce genre d'affaires, et le Canard n'est pas un journal qui a l'ambition d'être un redresseur de torts: ça faisait rire (jaune) les mauvais esprits, les politiques jouaient aux vierges effarouchées. Les autres media se contentaient souvent de relayer l'info en bas de page six mois plus tard quand elle se trouvait confirmée.
Désormais, certains journaux en ligne (Rue 89 etc) ou blogueurs aiment fouiller la merde faire leur boulot (pour la douche, ça voulait dire lire le rapport de la Cour des comptes) et sont plus engagés dans le "combat politique".
- L'autre hypothèse, c'est que ce genre de frasques se fait maintenant au vu et au su de tout le monde, façon "décomplexée": il n'y a pas de honte à être politique et kiffer sa life, la politique est une carrière lucrative au même titre que le showbiz ou les affaires, et plus un sacerdoce depuis un bail. Du coup, même pas besoin que les journalistes aient besoin de fouiller, tout est là sous nos yeux, ça a commencé le soir des élections au Fouquet's. J'ai l'impression qu'il n'y a pas si longtemps - quand j'étais gamin -, quand les politiques se faisaient construire une piscine aux frais du contribuable, ils se cachaient un petit peu. Aujourd'hui, tout ça se fait avec moins de peur ou de gêne et plus de sourire façon "oui on vous encule se fout de votre gueule,et alors?".
Dans l'ensemble, ils auraient tort de se gêner: quand ils nous prennent le bras et que ça devient trop gros, ils nous rendent généreusement un doigt et font passer ça pour du "courage politique".
Il te ressemble ; il est terrible et pacifique.
Il est sous l'infini le niveau magnifique ;
Il a le mouvement, il a l'immensité.
Apaisé d'un rayon et d'un souffle agité,
Tantôt c'est l'harmonie et tantôt le cri rauque.
Les monstres sont à l'aise en sa profondeur glauque ;
La trombe y germe ; il a des gouffres inconnus
D'où ceux qui l'ont bravé ne sont pas revenus ;
Sur son énormité le colosse chavire ;
Comme toi le despote il brise le navire ;
Le fanal est sur lui comme l'esprit sur toi ;
Il foudroie, il caresse, et Dieu seul sait pourquoi ;
Sa vague, où l'on entend comme des chocs d'armures,
Emplit la sombre nuit de monstrueux murmures,
Et l'on sent que ce flot, comme toi, gouffre humain,
Ayant rugi ce soir, dévorera demain.
Son onde est une lame aussi bien que le glaive ;
Il chante un hymne immense à Vénus qui se lève ;
Sa rondeur formidable, azur universel,
Accepte en son miroir tous les astres du ciel ;
Il a la force rude et la grâce superbe ;
Il déracine un roc, il épargne un brin d'herbe ;
Il jette comme toi l'écume aux fiers sommets,
Ô peuple ; seulement, lui, ne trompe jamais
Quand, l'oeil fixe, et debout sur sa grève sacrée,
Et pensif, on attend l'heure de sa marée.
Victor Hugo, les Châtiments, Au Peuple.