Dur d'évoquer un coup de foudre quand on est resté à ce point dans le superficiel, mais je pense qu'on peut parler de "little crush". Petit béguin, in French, me souffle JCVD.
Je ne parle pas ici de remplacer l'irremplaçable Priscilla, mais de ma découverte de l'Islande, en sa douce compagnie.
Ce petit pays, grosso merdo un rectangle de 300 kms sur 200 kms de côté, paraît parfois aussi immense et riche que les USA. Ok, New-York en moins.
Déjà, 200000 de ses 300000 habitants sont concentrés dans Reykjavik et sa banlieue. Autant dire qu'on peut avoir l'impression d'être au fin fond du désert à 30 bornes de la capitale, ne croisant, le long de la "main road" que des stations-services ou fermes qui ne dépareilleraient pas dans le Midwest le plus reculé. En plus, ils servent des hotdogs et des burgers. Cet effet est renforcé par le fait qu'il n'y a pas beaucoup de routes, et que vu leur état, on ne roule de toute façon jamais très vite dans ce pays.
L'autre aspect saisissant, c'est la variété des paysages croisés sur des distances de l'ordre de la centaine de kilomètres: anciens champs de lave, glaciers gigantesques, plaines pour l'élevage des moutons ou des chevaux, caascades majestueuses, sources chaudes etc. On a, en quelques heures, l'impression de passer par moult pays aux climats et reliefs totalement différents.
Nous n'avons visité que la partie sud-ouest du pays, Reykjavik, le "Golden Circle", le "Blue Lagoon", et nous avons poussé jusqu'au glacier Jokulsarlon en passant devant le volcan Eyjafjallajokull, malheureusement dans le brouillard (mais nous avons bien vu l'étendue de cendres le long de la route). Et encore, ce petit tour n'a été fait que très superficiellement, majoritairement au cours d'excursions journalières pour touristes allemands*, ou en utilisant le réseau de bus du pays.
En tout cas, ça donne envie d'y retourner, peut-être en petit groupe pour des vacances plus longues et plus rock'n'roll, en sortant un peu plus des sentiers battus.
Il faut quand même ajouter que l'Islande, c'est une destination pour les rebelles, mais plutôt la version Teknikart que la version Kerouac ou Easy Rider**. Pour être "libre", il faut louer un 4*4 à 100$ la journée. Et niveau bouffe et dodo, même les options campings ou gîte reviennent vite à 25-50$ la journée. Bref, la jouer roots, c'est possible, mais faut avoir du blé quand même. Parce qu'à mon avis, ceux qui pensent que leurs randonnées en Auvergne les ont préparés à tout ont vite fait de finir comme McCandless en s'aventurant un peu trop à l'arrache dans les Highlands.
Quelques photos:
Le Blue Lagoon: C'est un peu "ze" attraction touristique en Islande. C'est un lac artificiel, causé par les eaux de rejet d'une centrale géothermique, au milieu d'un ancien champ de lave. La couleur bleue fluo est dûe aux micro-algues et à une espèce d'argile qui se transforme en pâte blanche sous l'effet de la flotte et dont on peut se servir pour s'exfolier la peau. Ou alors, c'est pas une centrale géothermique...
C'est hachement sympa de se baigner en extérieur avec un différentiel de température de 30 degrés. Il y a également possibilité de faire du sauna, du hammam, massages etc.
Cela dit, dans mon esprit, c'était un domaine super vaste, alors qu'en fait c'est une piscine géante, pas beaucoup plus grand en superficie qu'une piscine olympique, où la profondeur ne dépasse jamais le mètre.
Bref, ne comptez pas y rester une journée, 2-3 heures sont largement suffisantes. Après, vous dormirez comme un bébé, donc beaucoup de gens font ça avant d'aller prendre l'avion. Je pense que c'est une bonne idée. Jusqu'à midi, c'est assez peinard, après ça commence à être blindé, et avouons que la moyenne d'âge est assez élevée.
Entrée + trajet en bus: environ 50$.
Le Golden Circle: la route historique du pays, autour de Reykjavik. On passe par les fameux geysers, des cascades, et le parc national où on peut voir la faille dûe aux plaques américaines et européennes sur lesquelles repose le pays (qui fait que celui-ci "grandit" chaque année).
Vik i Myrdal: village situé au pied du volcan Katla, le vrai gros volcan d'Islande. L'autre, c'est un petit pour les fiottes. Ca fait presque 100 ans qu'il n'a pas été en activité, alors que jusque-là il pétait en gros deux fois par siècle. Autant dire que les jours du village sont comptés. Depuis quelques années, ils s'"entraînent" même régulièrement à des évacuations.
Jokulsarlon: Le glacier du parc naturel Vatnajökull se jette ici dans la mer, la glace se brisant dans l'estuaire. Certains icebergs sont noirs, car couverts des cendres des volcans avoisinants. Impressionnant.
Reykjavik est une petite ville sympa, qui se visite facilement en deux jours. Le week-end est assez marrant: les islandais sortent le look, on a l'impression d'être dans un village anglais avec la faune de NYC ou des quartiers de Paris où je ne vais pas. Puis ils se mettent des grosses caisses à la bière. Faut dire qu'à partir d'avril-mai, la nuit ne tombe plus: à 2h du mat' on a l'impression qu'il est 20h, et donc on a vite fait de se retrouver au bout de la night.
Quelques mots sur la bouffe pour finir - on ne se refait pas-: il n'y a pas forcément beaucoup de vraies "spécialités" islandaises. Dans les plats typiques, on trouve des ragoûts de poisson ou des soupes de mouton. Cela dit, ils ont des produits bruts fantastiques, notamment leur agneau: l'élevage est loin d'être intensif, vu le climat pas trop besoin de pesticides pour les patûres... tout ça se sent, la viande est d'une d'une tendreté et d'une saveur incroyables.
Leur cheval n'est pas mal non plus (c'est une espèce unique dont ils conservent jalousement la pureté). Ils s'en servent comme moyen de locomotion, mais un peu autrement aussi.
Après, ils consomment un petit oiseau mignon et pas mauvais, dont le goût et la texture sont proches du canard, le puffin.
J'ai aussi dit fuck à mon côté bobo-écolo, en goûtant de la baleine. En "sushi" (plus proche du tartare, en fait) et en steack. Vrai goût de viande rouge, la texture fait un peu penser au thon.
Ils ont également pas mal de produits fumés, mais le goût cendré est un peu fort pour moi: est-il dû au bois utilisé, ou à une technique particulière?
Je n'ai pas pu tester l'otarie, ni certains poissons du coin.
Mon conseil: Reykjavik est, as I said, une ville un peu branchouille. Il y a donc pas mal de restos "fusion" dans le style de Fish Market. Evitez. Un coup de sauce barbecue par là, un sushi par-ci, une sauce thaï aussi... un gloubi boulga de saveurs sucrées-salées qui servent surtout à masquer que les produits sont pas terribles (quelle déception d'avoir des sushis de thon et de saumon fades comme dans le plus mauvais faux sushi parisien quand on voit la qualité de leur pêche).
Allez plutôt dans les restos old-school (ceux qui n'ont pas une ambiance lounge), comme Prir Frakkar. Le service est pas terrible, les accompagnements sont sans intérêt, mais les poissons et viandes sont excellents.
Je pense que Dill et Einar Ben sont également des bons choix dans cette catégorie.
Comptez au moins 50$ pour un repas complet dans un resto un peu upscale, mais les desserts sont souvent sans intérêt.
Sinon, il y a des restos à burgers, des thaïs et des pizzerias à tout va, où on doit s'en tirer pour environ 20$.
Une remarque au niveau du service: c'est assez spécial. Il nous est arrivé plusieurs fois que les serveurs nous ignorent pendant 15-20 minutes, sans que ça semble être comme à Paris uniquement pour vous faire chier parce que votre gueule ne leur revient pas. Une fois qu'ils s'occupent de vous, ils sont plutôt souriants, et prévenants. Un peu déroutant.
Pour conclure sur le rayon culinaire, la grosse spécialité au rayon "petite gourmandise" est la morue séchée. Ca a une odeur de bouffe pour poissons d'aquarium, et une texture pas très agréable. Au goût, c'est plutôt neutre. Plus exotique que très intéressant.
L'autre "plat historique", c'est le Hàkarl, du requin pélerin fermenté. La pire expérience culinaire de ces dernières années en ce qui me concerne. Le requin est immangeable fraîchement pêché, car empoisonné. Pour le bouffer, les islandais l'enterrent puis le laissent sécher plusieurs mois.
Ca a une odeur de poisson fumé que je n'ai pas trouvé insupportable.
Dans la bouche, le goût est d'abord à l'avenant, puis la pourriture de la chair vous envoie une giclée d'ammoniaque qui vous arrive dans la gorge et les narines, comme si vous veniez de tomber dans les vapes et qu'on vous avait foutu des sels sous le pif. Dans le Lonely Planet, ils mettent en garde, et ma vanité de Frenchy qui bouffe du vacherin me faisait penser que franchement, ces ricains étaient des fiottes... comme quoi, parfois, faut être humble. Par contre, eux trouvaient l'odeur pire que le goût. Apparemment les locaux le font passer avec un schnapps local, j'aurais dû être plus prudent.
* Le touriste allemand en groupe est largement aussi beauf que la version française. Cela dit, il est plus discipliné, et donc en s'éloignant à plus de 15 mètres du bus ou de la boutique de souvenirs, il y avait moyen d'être peinard. Et puis, on n'est jamais dans les eaux de la Tour Eiffel ou de l'Empire State Building, en tout cas en cette période de l'année. 2-3 cars max à un endroit donné, généralement un site naturel assez vaste, on avait pas l'impression de se marcher sur les pieds non plus.
** Il semble d'ailleurs que le voyage en Islande révèle le "inner rebelle" qui sommeille chez beaucoup. A l'embarquement, j'avais l'impression que plein de gens partaient avec leur maison (j'entends par la 50 kilos de bagages/ personne). Alors, dans le tas, il y avait quelques backpackers bien roots, probablement aussi quelques ricains en transit (les ricains particulièrement ne voyagent jamais sans au moins 2 immenses valises par tête) et peut-être quelques partants pour 1 mois ou 2 (encore que vu le prix de la vie là-bas, j'ai des doutes).
Mais je suis aussi persuadé qu'il y avait un bon paquet de blaireaux qui avaient l'impression de partir à l'aventure alors qu'ils ne sont pas sortis de Reykjavik à part pour les excursions customisées avec bus climatisé et guide. Parce que les Delseys à roulette d'1 mètre cube, c'est pas super pratique pour aller au sommet des glaciers.
Vu qu'on a aussi fait une de ces excursions (très chouette d'ailleurs), je crois les avoir reconnus facilement: c'était les mecs en polaire (alors qu'il faisait 15 degrés) et chaussures de montagne (alors qu'on ne s'éloignait jamais des sentiers balisés d'un niveau randonnesque assez proche de ceux du jardin du Luxembourg). Parce qu'on sait jamais.