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  • : La vie au labo
  • : Les pensées - j'ose le mot- diverses d'un jeune scientifique ayant obtenu un poste académique à l'Université, après presque trois années en post-doctorat dont deux au fin fond du Massachusetts. Ca parle de science (un peu) mais surtout du "petit monde" de la science. Et aussi, entre autres, de bouffe, de littérature, de musique, d'actualité, etc. Et de ma vie, pas moins intéressante que celle d'un autre.
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19 décembre 2012 3 19 /12 /décembre /2012 13:02

Je suis de plus en plus convaincu que, dans une majorité des cas, le "mérite scientifique" personnel n'est qu'un facteur mineur dans la réussite d'une carrière scientifique. Et que les indicateurs de performance ne révèlent au mieux que quelque chose de très partiel.

 

Si je prends mon propre exemple. 

Aujourd'hui, ma production scientifique est probablement dans la moyenne de mon domaine, peut-être la moyenne basse. J'ai sorti 3 papiers premier auteur pendant ma thèse, plus un proceeding avec comité de lecture. Puis 2 papiers premier auteur pendant mes 2 ans de post-doc aux US. Rien pendant les 6 mois de post-doc de retour avant de trouver un poste, puis rien pendant ma 1ère année MCF. Cette année, un brevet, un proceeding avec comité de lecture et un papier reprint author. A priori, un papier premier auteur devrait sortir l'an prochain, plus un ou deux co-auteur. Comme j'ai maintenant deux étudiants, cela devrait rouler au moins pour les 2 ans à venir.

Bref, 5 papiers 1er auteur, 1 brevet, 1 papier reprint author, 2 proceedings à comité de lecture, en ayant commencé à publier en 2006: pas de quoi avoir honte (et pas encore de quoi se dire que passer Prof relève à tout jamais de l'utopie), mais pas de quoi se taper le cul par terre. 

 

Toutefois, il s'en est fallu de peu pour qu'à l'heure où j'écris ces lignes, sans être en aucune façon "plus excellent" que je ne le suis, je compte quasiment deux fois plus de papiers: quand je suis parti de mon labo de thèse, une post-doc était censé continuer sur mon boulot. Il se trouve qu'elle n'était pas très dégourdie et qu'au bout de quelques mois, mon chef a décidé de changer son fusil d'épaule et de lui faire faire autre chose. Pouf, un ou deux papiers potentiels qui tombent à l'eau.

En post-doc, j'ai mis au point, avec un autre post-doc, une manipe. Nous en avons tiré un papier. Cette manipe (que j'ai fini par reconstruire dans mon labo français) a permis à mon chef de publier une dizaine de papiers depuis que je suis parti, dont une bonne moitié est vraiment la pure continuation de mon boulot. Bref, ce papier est du coup bien (auto-)cité, mais je connais un certain nombre de laboratoires où j'aurais été "co-auteur" automatique (au moins pour les papiers qui incrémentent la manipe ou traitent de la physique qu'elle met en jeu).

Du coup, je pourrais très bien aujourd'hui avoir une liste de 15 papiers au lieu de 8. A priori, je ne serais pourtant ni meilleur ni moins bon que je ne le suis.

 

Enfin, il me semble que l'environnement est un élément clé pour un MCF: entre certains collègues en école d'ingé qui bénéficient de décharges, de bons étudiants à disposition, et dans certains cas de fonds importants, d'autres dans des labos "de pointe" qui ont 2 doctorants à disposition dans l'année qui suit leur nomination, et d'autres collègues à qui on demande d'assurer 300HED et dont les laboratoires ne fonctionnent qu'avec des stagiaires de L3, la production scientifique va rapidement diverger même si le "niveau d'entrée" est souvent assez similaire.

Ce n'est pas comme si l'offre était pléthorique et que la part de chance dans les auditions était nulle et qu'on pouvait affirmer "vu mon niveau, je n'irai que dans la crème des labos".

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commentaires

N
Ludwik Fleck (médecin, microbiologiste, immunologiste, juif polonais mort en 1964) a bien pensé la question du génie individuel dans Genèse et développement d'un fait scientifique (1935, publié en allemand en Suisse, traduction française 2005 réédition 2008) en montrant que la réaction de Wasserman des années 1930 n'avait absolument rien à voir avec le papier de 1906 de Wasserman alors même que l'on continuait à attribuer la réaction de Wasserman à Wasserman, 1906. Entre temps, ce sont 10 000 publications qui ont modifié progressivement à la fois le contenu théorique et les protocoles expérimentaux. Wasserman lui-même n'avait pas travaillé seul. Fleck pose la question de "qui est l'inventeur de la réaction de Wasserman ?" Sa réponse "un collectif de pensée", caractéristique des sciences contemporaines.
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D
<br /> J'ai eu un post-doctorant allemand qui voulait me rajouter, voire rajouter le directeur du laboratoire, comme co-auteurs d'un article auquel ma contribution se résumait à l'avoir écouter discuter<br /> devant un tableau et avoir fait quelques observations (il me semble judicieuses) ; je lui ai fait observer que cela méritait certes un remerciement en fin d'article, mais pas d'être co-auteur.<br />
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M
<br /> <br /> Je me suis retrouvé "remercié" sur un papier où je ne sais pas trop quoi penser. Je n'ai pas fait de manipes, mais ai relu le papier, donné un certain nb de références biblios et pas mal discuté<br /> (c'était un sujet que je maîtrisais alors qu'il était nouveau pour le premier auteur, et nous étions co-bureau). A posteriori, un remerciement n'est pas scandaleux, mais sans doute que si j'avais<br /> été "assistant prof" à l'époque, on m'aurait mis dans les co-auteurs...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> On avait aussi un ATER vietnamien qui n'a jamais vraiment compris qu'il y avait quand même quelques règles éthiques et que mettre ou enlever un nom ne dépendait pas juste de l'humeur du moment ou<br /> si tu aimais bien quelqu'un ou qu'il était ton chef. Il est aujourd'hui au Canada, et il continue, je pense sans penser à mal... il vient de sortir un article sur ses travaux d'ATER avec comme<br /> co-auteur son chef canadien uniquement...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bref, quelques règles communes intradisciplines ne seraient pas forcément de trop... même limité je pense que le fait que les éditeurs demandent les contributions individuelles est un pas dans la<br /> bonne direction...<br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> @mix Du coup ça explique peut-être le poids absolument délirant mis sur l'oral pour les concours. Sauf qu'en réalité ça teste plus la capcité à bullshitter en temps réel sur un ton assuré qu'à<br /> vraiment donner une bonne idée de la valeur intinsèque du candidat et ça fout largement en l'air ceux qui sont paralysés par l'enjeu (genre, moi).<br /> <br /> <br /> Après pour Priscilla, si les commissions faisaient ce que je suggérais, elle ne serait finalement plus sous-publiante comme tu le dis. Je veux bien que ce soit important de publier quelques<br /> papiers en n-è auteur pour montrer qu'on n'est pas complètement sociopathe mais ça doit pouvoir se voir dans les lettres de recommandation ça d'ailleurs. D'ailleurs quand on voit la commission,<br /> je ne sais pas comment c'est exactement en bio, mais dans la mienne c'est pas comme si tous les membres avaient une liste de publications à se pâmer devant non plus. Avec l'ancienne commission<br /> CNRS j'avais déjà publié plus qu'une partie non négligeable des membres (et plus que la plupart des embauchés). Je ne parle qu'en 1er auteur, bien sûr. Après on me rétorquera qu'étant plus<br /> avancés dans leur carrière il n'est pas choquant qu'untel n'ait publié que 5 papiers 1er auteur dans sa vie parce qu'il a plein de collaborations. Et d'ailleurs, puisqu'on s'amuse à qui a la plus<br /> grosse (liste de publications), j'ai 2x plus de papiers que mon directeur de thèse lorsqu'il a été embauché (à mon âge) et je pense que d'ici 2 ans je l'aurai rejoint. Bon, j'ai de toute façon<br /> publié plus que pas mal de DR/PR. Je suis un peu moins cité quand même vu que mes papiers sont beaucoup plus jeunes.<br />
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M
<br /> Pour rejoindre " postdoc", je tire des conclusion oppose a celle de mix sur le caractere aleoitoire de l'excellence. Si on filtre les publies n-eme auteurs (n>2-3), on voit bien dans l'exemple<br /> de mix que son publication record depend bcps moins de la chance que l'on veut bien le penser.<br /> <br /> <br /> Perso, ca me rapelle une discussion que j'ai eu avec une directrice de recherche a l'INSERM.<br /> <br /> <br /> Moi: Quelle type de publication record il faut pour reussir le concours ?<br /> <br /> <br /> Elle: 10 papiers.<br /> <br /> <br /> Moi etonné: 10 papiers premier auteur ? Ca fait beaucoup quand meme.<br /> <br /> <br /> Elle: Nan juste 10 papiers. L'ordre des auteurs ne compte pas.<br /> <br /> <br /> ....<br /> <br /> <br />  <br />
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M
<br /> <br /> Il me semble qu'on a les mêmes observations, pas les mêmes conclusions.<br /> <br /> <br /> Les papiers 1er auteur relèvent sans doute un peu plus du mérite, encore que... surtout en début de carrière en tout cas en France (thèse, voire M2 et éventuellement 1er post-doc) ça dépend aussi<br /> beaucoup de la qualité de l'encadrement, de la pertinence du sujet, sa "hotness", les habitudes de publication du chef, des ressources disponibles, du fait que le projet est collaboratif ou solo,<br /> qu'il est sur des thématiques bien ancrées du labo ou au contraire plus exploratoire... choses que l'on ne sait pas forcément démêler quand on accepte une thèse...<br /> <br /> <br /> Le pb étant comme signalé qu'aujourd'hui, la plupart des indicateurs prennent en compte tous les papiers en faisant plus ou moins mine (même si ce n'est pas totalement vrai pendant les<br /> recrutements en tout cas, encore que voir ci-dessous) de ne pas voir la différence entre 1 papier 1er auteur et un papier nième auteur.<br /> <br /> <br /> Priscilla est souvent considérée comme "légèrement sous-publiante" dans les commissions tout simplement parce que tous ses papiers sont 1er auteurs et qu'elle n'a jamais eu de projet<br /> collaboratif. Son nb de papiers 1er auteur est tout à fait similaire à celui des autres candidats, sauf que ceux-ci ont 3-4 papiers en + "collaboratifs".<br /> <br /> <br /> Bref, le "nb de papiers" pris tel quel reflète beaucoup de choses, parmi lesquels figure la qualité du publiant, mais aussi sa chance, son opportunisme, les habitudes des labos par lesquels il<br /> est passé, la qualité de ses encadrants (en début de carrière en tout cas), ses ressources financières etc. Difficile selon moi de tout démêler, d'isoler un facteur et de conclure "lui est<br /> excellent scientifiquement, lui est médiocre".<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> D'ailleurs, beaucoup de revues demandent maintenant un paragraphe "contribution des auteurs" ou il faut indiquer ce que chacun a fait... Malheureusement, comme pour tout cela repose sur la bonne<br /> fois des auteurs et ce paragraphe peut aussi bien refleter la realite comme s'averer parfaitement fantaisiste si redige pour qu'il n'y ait pas l'air d'y avoir un desequilibre flagrant entre les<br /> contributions, et autres situations farfelues.<br />
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