Je prends le bus tous les jours, pour deux fois 25 minutes de trajet dans Paris intra-muros.
Après comparaison avec le métro, le tram et même le RER, je crois pouvoir affirmer que c'est le transport public parisien dans lequel la connerie humaine sous toutes ses formes s'exprime le mieux. Surtout le soir, d'ailleurs, pour une raison qui ne m'apparaît pas évidente (si ce n'est qu'après une journée de merde, le parisien moyen est encore moins sympa que d'habitude).
Egoïsme, bêtise crasse, incivisme, impolitesse, méchanceté, indifférence totale... chaque jour, on peut voir un peu tout ça et plus encore.
Au hasard et dans le désordre, on peut citer:
- les fatigués de la vie qui refusent de bouger le cul de leur strapontin pour désengorger un peu l'espace, même quand 124 personnes sont agglutinées dans le couloir.
- les mêmes fatigués de la vie qui préfèrent se jeter sur le fauteuil que tu viens de libérer quitte à te rentrer dedans (sans un mot d'excuse ni même un regard) et t'écraser en s'échinant à passer à deux dans un couloir de 30 cms de large plutôt que d'attendre 20 secondes que tu descendes.
- les toujours épuisés ou les bovins finis pour qui descendre du bus lorsque celui-ci est bondé et qu'ils bloquent la sortie, afin de faciliter la descente, semble au-dessus de leurs forces physiques et/ou mentales.
- les hommes pressés qui se ruent dans le premier bus bondé bien qu'il y en ait un vide de la même ligne 200m derrière (parce que quand un bus est bondé, il met 2 minutes à redémarrer après chaque arrêt, ce qui fait que celui derrière le rattrape rapidement).
- les mêmes qui se précipitent à l'intérieur par la porte de derrière avant que personne n'ait pu descendre (cf le métro).
- les petits vieux à qui ça arracherait la gueule de dire merci quand tu leur donnes ta place spontanément.
- ces mêmes petits vieux qui semblent prendre un malin plaisir à prendre le bus entre 17h30 et 19h tous les jours, quand ce n'est pas à 8h30. C'est encore mieux quand en plus ils en veulent à la terre entière parce qu'oh la la il y a du monde.
- les encore éreintés qui font semblant de ne pas voir les petits vieux ou les impotents pour ne pas avoir à bouger leur cul du siège prioritaire (je faisais ça quand j'étais un pisseux rebelle de 14 ans, à 30 ans ça me fait un peu honte).
- ceux qui préfèrent la promiscuité et les mauvaises odeurs corporelles, et donc s'entasser dans le couloir sans bouger même s'il y a 15 places libres au fond, donnant l'impression que le bus est bondé alors qu'il est à moitié plein.
- les mêmes amateurs de contact humain qui viennent s'asseoir à côté de toi même si le bus est vide (on les retrouve ensuite au cinéma).
- les blaireaux qui gueulent au téléphone pendant toute la durée du trajet, et exposent à tous leur médiocrité et leur mauvaise éducation avec fierté.
- ceux qui écoutent leur musique de merde à bloc, avec un body-language signifiant plus clairement qu'une affiche "je vous emmerde tous et vous n'avez pas de couilles" (à raison, d'ailleurs).
- ceux qui parlent au chauffeur comme s'il était une sous-espèce ne méritant même pas un bonjour ou un s'il vous plaît-merci, beuglant "LA PORTE" ou autre chose d'un ton exaspéré.
- les chauffeurs qui eux aussi en ont marre d'être simplement courtois, voire parfois de s'arrêter simplement aux arrêts prévus.
- ceux qui ne se bougeraient pas le cul d'un centimètre pour aider une mère et sa poussette ou à défaut simplement la laisser rentrer et caser sa poussette dans l'espace prévu à cet effet.
- les mères et leurs poussettes qui défoncent pieds et jambes quand le bus est blindé, qu'il y a déjà 3 poussettes entassées dans l'espace central prévu pour deux: je suis une mère, je suis unique, vous ne savez pas ce que c'est, je suis prioritaire.
Etc, etc.
On peut voir régulièrement tous ces comportements dans les autres transports en commun, mais j'ai l'impression qu'ils sont beaucoup plus exacerbés et réguliers dans le bus qu'ailleurs. Je n'ai pas vraiment d'explications, et ce n'est après tout qu'un ressenti. Je ne suis moi-même pas exempt d'être à l'occasion un gros con, décérébré ou mal élevé. Mais en général j'en prends conscience à un moment ou à un autre, même si c'est parfois trop tard, ce que je ne peux certifier chez les autres, tant leurs pupilles semblent souvent plus vides qu'un intestin après un traitement laxatif.
Je devrais me remettre au métro, finalement plus calme*, mais bizarrement l'aspect sombre et sale me rend plus dépressif. Mieux vaut entretenir la misanthropie.
* je dirais que le pékin moyen est plus philosophe dans un métro bondé que dans un bus bondé.