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  • : La vie au labo
  • : Les pensées - j'ose le mot- diverses d'un jeune scientifique ayant obtenu un poste académique à l'Université, après presque trois années en post-doctorat dont deux au fin fond du Massachusetts. Ca parle de science (un peu) mais surtout du "petit monde" de la science. Et aussi, entre autres, de bouffe, de littérature, de musique, d'actualité, etc. Et de ma vie, pas moins intéressante que celle d'un autre.
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12 février 2016 5 12 /02 /février /2016 08:48

Un petit mot sur l'actualité.

Fleur Pellerin, politicienne nouvelle génération parfaitement dans le moule de l'ancienne (ESSEC, Sciences Po Paris, ENA) est virée du Ministère de la Culture. François Hollande, lors de sa nomination, ne lui avait pourtant pas demandé grand chose: "rien d’autre que « d’aller voir Jack [Lang] », qui « a des idées », et de « [se] taper » des « spectacles »".

 

Hélas (pour elle), outre sa gestion des cas Agnès Saal et Mathieu Gallet/Radio France, entre autres, ce qui a surtout choqué le Landerneau, c'est qu'elle ait admis assez ouvertement n'avoir jamais lu de Modiano, lorsque celui-ci obtint le Prix Nobel. 

J'avoue humblement que, bien que lisant au moins 2 livres par mois, essentiellement des romans, depuis l'âge de 8 ans, je ne l'ai jamais lu non plus (mais comme je suis un scientifique peu cultivé, ça ne pose pas de problèmes). 

 

On (le dit Landerneau médiatico-politique en tout cas, je pense qu'une grande partie des gens se contrefout du ministère de la Culture) fait donc semblant de croire qu'un "bon" ministre de la Culture se doit d'être quelqu'un ayant lu tous les auteurs potentiellement nobélisables, connaissant les grands musiciens, amateur d'opéras, de concerts classiques et de jazz mnimaliste. Franchement, il y a certes, j'imagine, une partie "représentation" dans la fonction de ce ministre, mais après tout on peut bien aller à l'opéra simplement pour s'y montrer et s'y faire grave chier, tant que ça ne se voit pas trop. Pour le reste, j'espère que son travail au quotidien ne mobilise que rarement comme ressources intellectuelles la connaissance de l'oeuvre intégrale de Modiano ou J-M-G. Le Clézio (autre auteur français nobélisé dont je n'ai rien lu, si ce n'est les 50 premières pages du Procès-Verbal qui m'est ensuite tombé des mains).

 

En parallèle, il n'y a pas si longtemps, un ministre de l'Education Nationale, X. Darcos (universitaire, une fois n'est pas coutume), peut avouer en rigolant à la télé qu'il n'a aucune idée de comment on fait une règle de 3.

 

 

 

 

Vous me direz qu'au fond, ça ne sert pas plus pour la fonction que d'avoir lu Modiano et que tout ça, c'est un procédé débile (depuis utilisé à toutes les sauces par Bourdin) discréditant les politiques.

Je me fais sans doute une fausse idée du travail des politiques, mais il me semble qu'admettre qu'on ne maîtrise pas le calcul niveau primaire ou collège est un peu plus inquiétant que de ne pas avoir lu un romancier primé. Parce qu'en gros, ça montre qu'on est incapable de comprendre un budget, d'analyser les chiffres donnés dans un rapport (les mettre en perspective, comprendre la méthodologie employée), qu'on ne sait pas raisonner en termes d'ordre de grandeur (si je concentre mon action sur telle somme mais qu'elle représente un pouième des sommes mises en jeux, est-ce que mon action a un intérêt autre que politique?) etc.

En conclusion, j'"over-analyse" sans doute un peu trop, mais je vois dans ces deux situations (qui ne sont que des exemples parmi tant d'autres) le symbole d'une "élite" historiquement très majoritairement issue des disciplines "littéraires" et un peu méprisante envers la bassesse terre-à-terre des "matheux", "physiciens", et autres "scientifiques".

Bref, si tu veux briller à Saint-Germain, dire en riant que tu sais pas compter ta monnaie quand tu payes ton café à 8€ c'est du dernier chic, mais si t'as pas lu l'intégrale de Foucault, t'es pas vraiment capable de penser.

Or, naïvement, j'aurais tendance à penser que pour mener des politiques publiques, des bases scientifiques solides sont plus importantes qu'une maîtrise des principaux concepts philosophiques ou de la vie littéraire du 20ème siècle.

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19 juillet 2013 5 19 /07 /juillet /2013 09:00

La dernière mise à jour ayant eu lieu en 2010, et une discussion sur Twitter ayant ravivé quelques souvenirs, où en suis-je dans ma quête des lectures que j'aimerais faire mais que je n'ai pas encore faites et que je ne ferai sans doute jamais?

 

Donc, le but est de lister ici par pays les écrivains (romanciers) que je n'ai pas encore eu la chance de découvrir, que j'ai déja un peu lus (et qui ne m'ont pas plu) ou dont je n'ai jamais terminé un livre, histoire de leur donner une seconde chance.

 

Je ne suis pas de "plan de lecture", ni ne consulte chaque mois cette liste pour en voir l'avancée, c'est un peu au feeling.

Je reste à l'écoute de vos éventuelles suggestions. Les noms soulignés correspondent aux écrivains qui étaient dans les précédentes version de la liste, mais dont j'ai lu un ou plusieurs livres depuis (c'est un peu le tonneau des Danaïdes).


Pour une liste concernant mes favoris parmi les livres et auteurs que j'ai déjà lus, et qui peut expliquer l'absence de certains grands noms, voyez ici et .

 


- France:
La Fayette - La Princesse de Cleves qui a connu une deuxième jeunesse suite à une déclaration bien vulgos de notre ex-président.
Chateaubriand - Les Mémoires d'outre-tombe
Sade - j'avais commencé Aline et Valcour, a retenter (échos pas terribles cependant)
Saint-Simon - Mémoires: un mec qui raconte sa vie en 25 volumes de 1000 pages, ça ne peut etre qu'intéressant, non?
Flaubert - Bouvard et Pécuchet, c'était chiant. Je n'ai jamais réussi a me farcir l'Education Sentimentale, faudrait que je tente Madame Bovary
Maupassant - Bel Ami, mais les "romans d'éducation", c'est un peu tout le temps pareil quand meme
Ponson du Terrail - Rocambole. Hélas introuvable désormais, ou presque.
Malot - Sans famille. Les aventures du petit Rémi. Assez étonnemment, le dessin animé est finalement extrêmement fidèle. Sinon, c'est un roman d'aventures du 19ème siècle avec les qualités (lecture prenante et facile) et les défauts (morale sociale qui a pas forcément très bien vieilli, incohérences dans le récit, suspense parfois un peu fastoche, personnages binaires...) du genre. On a depuis assimilé ça à un roman pour la jeunesse, mais elle doit avoir le coeur bien accroché, avec toutes ces morts affreuses qui s'enchaînent. 
Proust - 1 seul suffira je pense.
Peguy - ?
Aragon  - ?
Colette - Chéri. Selon moi, une merde petite-bourgeoise par excellence. Les problèmes existentiels d'une rentière pré-ménopausée: dois-je porter la robe bleue ou la verte pour continuer à plaire au petit puceau dilettante? J'en ai rien à foutre (passez-moi l'expression) et j'en parle ailleurs.

Kessel - la belle découverte de ces dernières années, j'ai lu les Cavaliers à mon retour du Kazakhstan, un superbe roman sur les nomades, le bouzkachi, l'honneur, la steppe. L'armée des ombres, sur les réseaux résistants, et la Steppe Rouge, recueil de nouvelles sur la Russie d'avant 17, m'ont moins marqué mais j'en essayerai d'autres.
Radiguet - Le diable au corps. Radiguet a été peut-être le premier "phénomène littéraire" vendu comme tel par son éditeur et son protecteur Cocteau, par le biais d'une campagne de pub annonçant l'avènement du "plus jeune romancier de France". Radiguet fréquentait les cercles littéraires et artistiques parisiens dès l'adolescence, juste après la Première Guerre, et a écrit le Diable au corps à 16 ans. Il mourut à 20 ans pour se faire un destin à la Rimbaud. En ce qui concerne le Diable au corps, c'est un roman (plutôt une nouvelle) que j'ai trouvée insupportable. Pas tant au niveau du style, somme toute assez classique, qu'au niveau du fond: le narrateur, qui se trouve être l'alter ego de Radiguet, est un jeune homme prétentieux, qui à travers l'histoire d'amour qu'il raconte, ne parle que de lui. La jeune femme qu'il séduit semble juste un prétexte, une abstraction. Le narrateur est également un pleutre, qui justifie ses actions comme mûrement pensées alors qu'elles sont juste le reflet d'une couardise sans nom. Enfin, comme un certain nombre d'adolescents, il est assez primaire mais est persuadé d'être le seul être humain doué d'intelligence et de sensibilité. Dans ce sens c'est intéressant, puisque rare sont les adolescents qui écrivent (ou en tout cas qui sont publiés), qui plus est sur les émois de l'adolescence. Bref, insupportable, mais probablement à lire (et puis ça fait 100 pages écrit gros).
Valéry - ?
Martin du Gard - Les Thibault, mais a-t-il écrit autre chose?
Mauriac - Noeud de viperes
Bernanos - Sous le Soleil de Satan
Bataille - ?
Céline - Je n'ai pas fini Voyage au bout de la nuit, j'avais trouvé ça vieillot (super, il parle en argot... so what? cf mes commentaires sur Orange Mécanique). A retenter quand même.
Duras et Yourcenar - En bon misogyne, je suis sûr que c'est le même genre intello-chiant (de Beauvoir ca doit etre bien dans le genre aussi).
Vian - Faudrait que j'arrive a finir l'Ecume des jours ou que j'essaye J'irai cracher sur vos tombes
Camus - J'ai lu l'Etranger et Noces, j'ai trouvé ça bof. Je viens de finir la Peste, j'ai trouvé ça bof aussi (vous admirerez la constance de l'analyse à défaut de sa subtilité). En fait, ces trois bouquins sont en quelque sorte des "romans philosophiques" et je crois que la philosophie de Camus c'est pas quelque chose à laquelle j'adhère franchement. D'autre part je trouve ça pas très puissant, entre "être un homme c'est pas facile parce qu'on sait pas vraiment pourquoi on est là" et "communier avec la nature, y a que ça de vrai". Soit, mais 300 pages là-dessus, entre personnages désabusés ou surblasés, c'est pas très folichon...
Sartre - la Nausée, les Mains Sales, je vais peut etre aller acheter Minute a la place...
Gide - Les faux-monnayeurs
Malraux - La condition humaine
Cohen (suisse) - Belle du Seigneur

Simon - le Tramway. Une sacrée épreuve. Des souvenirs d'enfance peu rock'n'roll le tout sans ponctuation.
Gracq -?
Le Clézio - Le Procès-Verbal (commencé et pas fini)
Echenoz - Cherokee, c'est pas mal. Un exercice de style "polar à l'ancienne" bien mené. J'essaierai de lire le Méridien de Greenwich un de ces quatre. J'ai depuis fini "Je m'en vais" qui est finalement assez semblable, avec la aussi un petit côté parigot désuet et une histoire policière "à la papa". Ca se laisse lire avec plaisir, mais j'espère que d'autres romans se renouvellent plus: sinon, c'est à pratiquer de façon espacée, pour ne pas se lasser.   
Chevillard - J'ai récemment terminé "l'Oeuvre posthume de Thomas Pilaster". Amusant, dans l'esprit (une espèce de biographie fictive) cela ressemble beaucoup au Nat Tate de William Boyd. Chevillard a l'air assez éclectique (même s'il a une forte attirance pour des aphorismes dont je ne suis pas toujours fan), donc j'y retournerai. J'en ai lu un ou deux autres depuis, avec plaisir mais sans grands souvenirs.
Green - (Julien) ?
Kundera - L'insoutenable légéreté de l'etre, ou un autre.

Carrère - Limonov et L'adversaire m'ont tous les deux beaucoup plu, et se ressemblent d'ailleurs pas mal. L'écriture de Carrère a un petit côté ego trip, puisqu'il aime comparer sa vie de bourgeois qu'il juge peu intéressante (ou fait mine de) à des "destins extraordinaires". 


- Allemagne:
Mann - J'ai Faustus dans ma liste d'attente, ou alors le truc avec la Montagne.
Bernhard - ?
Hesse - Le loup des steppes
Grass - Le tambour pas facile, intéressant cependant, et a par certains cotés, me semble-t-il, beaucoup influencé les Enfants de Minuit de Rushdie que j'avais beaucoup aimé dans la catégorie "livre exigeant mais hachement chouette quand même" (en terme de construction du roman, et de personnalité du narrateur).
Musil - L'homme sans qualité (Autriche)

- Russie:
Tolstoï - Guère épais... je dois avouer qu'apres 200 pages et 150 personnages en ov, j'avais craqué. Aurai-je le courage d'y retourner, ou prendrai-je plus court?
Tchekov - ?
Dostoïevski - jamais venu à bout, que ce soit les freres Karamazov ou Crime et Chatiment. Si j'essayais l'Idiot?
Gogol - On m'a offert ses Oeuvres en version Pléïade, je piocherai dedans.
Pouchkine - ?
Boulgakov - J'ai acheté le Maître et Marguerite, mais je n'ai pas encore osé m'y attaquer.
Pasternak - Docteur Jivago
Grossman - Vie et Destin. Une autre épreuve. Les romans russes de 1000 pages à 300 personnages, c'est un peu ma kryptonite (voir plus haut). Cela dit, une fois que j'ai accepté de souffrir pendant près de 2 mois (m'imposant minimum 200 pages par semaine) et également l'idée que je ne retiendrai jamais tous les personnages (les voyant ressurgir tous les 10 chapitres comme s'ils étaient nouveaux, tel un poisson rouge), c'est un roman majeur, entrelaçant les vies et les destins (on s'en serait douté) autour de la bataille de Stalingrad, qui changea le cours de la guerre. C'est aussi une charge violente contre Staline, à tel point que le manuscrit, saisi par le KGB, ne sera publié que dans les années 80, bien après la mort de Grossman. Il n'y avait même pas de circulation "sous le manteau" comme cela se faisait pourtant beaucoup. C'est long, pas toujours passionnant, mais il y a quelques vrais morceaux de bravoure.

- Italie:
Malaparte - Kaputt, Autre roman sur la guerre de 39-45, qui ne m'a pas bouleversifié. Malaparte traverse la guerre à l'italienne, façon Comedia dell'Arte. Pseudo "people", il fréquente les puissants (dont des Allemands, en tant que journaliste si je me souviens bien) pour s'en moquer, et n'apparaît pas comme quelqu'un de très sympathique, un peu donneur de leçon le cul dans la soie.
Svevo - oublié le titre (la conscience de Zeno, je crois), entendu beaucoup de bien.
Eco - La aussi, Eco c'est plus fort que moi, que ce soit le Nom de la rose, le Pendule de Faux cul ou même ses essais littéraires (que je trouve un peu pompeux, dans le genre je suis très culturé mais je le montre un peu trop, même quand c'est pas vraiment utile). Mais dans certains cas je n'aime pas perdre.
Calvino - J'en ai lu un qui m'a prodigieusement fait chier (Si par une nuit d'hiver un voyageur). Je suis prêt à donner une seconde chance un de ces quatre.

- Angleterre:
Fielding - Tom Jones, parce que la chanson de Springsteen est bien. Et Sexbomb aussi.
Thackeray - la Foire au vanités ou Barry Lindon.
Dickens - David Copperfield, Oliver Twist j'ai eu trop envie de le baffer dans le film de Polanski.
Austen - Orgueil et préjugés (j'en ai beaucoup sur ce livre...)
Wilde - Le Portrait de Dorian Gray, 5eme tentative?

Jerome - (K. Jerome) Trois hommes dans un bateau. L'un des premiers écrivains "populaires" (je veux dire issu de la classe moyenne, pas parlant du peuple). Comique à l'anglaise, mais pas encore très subtil, le vaudeville n'est pas loin. Ca se lit bien dans le métro, quoi.
James - Portrait de femme...
Joyce - J'ai acheté Ulysse il y a 7 ans avec beaucoup d'espoir. Je comptais sur les longues soirées d'hiver de Amherst mais ça ne s'est pas fait. Ou alors, j'irai acheter les Gens de Dublin, apparemment plus sympa.
Woolfe - ?

Waugh - Grandeur et décadence de l'humour à l'anglaise, ça se lit bien même si ça a un peu vieilli. Un peu comme Wodehouse quoi (voire quatre lignes plus bas). Peut être un peu plus "universel" malgré tout.
Poe - j'ai du lire quelques histoires extraordinaires gamin mais ça ne m'a pas marqué plus que ça.
Lawrence - Lady Chatterley meme si je crains que ça ait mal vieilli.
Kipling -  Le livre de la jungle. Lu en "VO". Pas de commentaires particuliers, conforme à ce que j'attendais: un classique, mais qui n'a pas forcément super bien vieilli. J'ai lu quelques nouvelles indiennes aussi.
Wodehouse - J'ai lu un des livres de la série "Jeeves and Wooster", en VO. C'est sympathique, "délicieusement suranné" diraient sans doute les critiques, très très british. Je crois que les dialogues de Astérix chez les Bretons ou du Pied-Tendre (Lucky Luke) viennent de là... Je ne vois pas très bien ce que ça peut donner en VF, pour le coup (l'anglais très années 20 des dialogues est pour beaucoup dans le capital sympathie du livre). Enfin, en lisant ce bouquin, je me suis rappelé une discussion que j'avais eu récemment avec une amie: dans le "culte", il y a une large part liée à l'époque d'une part, et au caractère précurseur d'autre part. Mais bon, quand on découvre hors contexte, on a toujours du mal à ne pas penser à ce qui a été fait depuis sur ce filon, souvent en mieux. 
Amis (pere) - J'aime beaucoup le fils, mais les bouquins du père sont difficiles à trouver en France et aux US. Un jour que j'irai en Angleterre peut être. Sinon, ça sera Lucky Jim, le seul que j'arrive à trouver.
Greene - (Graham)?
Pratchett - ? je ne crois pas que ça ait beaucoup d'importance non plus...
Lowry -  Au-dessus du volcan
Welsh (écossais) - Trainspotting

- Portugal:
Pessoa - L'intranquilité

- USA:
Twain - Huckleberry Finn Un bon roman d'aventures bien prenant. Dommage qu'il y ait le personnage de Tom Sawyer, que je trouve assez fatigant. D'un point de vue stylistique, c'est l'un des premiers romans où le langage parlé est utilisé comme langage narratif (j'en ai parlé plus en détails ailleurs).
Stowe - La case de l'Oncle Tom
Cooper - Le dernier des mohicans
Lewis - je ne sais même plus qui c'est, un Prix Nobel sans doute... mon coté snob.
London - Martin Eden Encore un livre qui m'a un peu énervé, c'est assez manichéen, le génie incompris tout ça. Je me suis laissé entendre dire que London était un gros mytho sur ses années d'aventurier, et se donnant le beau rôle dans ce roman soi-disant d'inspiration autobiographique. 
Faulkner - ?
Fitzerald - Gatsby le magnifique ou Tendre est la nuit.
Steinbeck - Des souris et des homnes ou les raisins de la colere.
Abbey - The Monkey Wrench Gang je crois.
Miller - Sexus, Nexus... Tropique du cancer, du capricorne. J'ai lu l'essai Lire aux cabinets, dont le titre faisait plus marrer que le contenu...
Pynchon - Un des rares romans que j'ai pas fini ces dernieres années (vente a la criée du lot ...). Deuxieme chance?
Heller - Catch 22 Pff, j'en ai chié. Lu en VO, pas facile, il m'a fallu du temps pour m'habituer au style, touffu. Un livre plutôt épais et assez répétitif même si j'ai fini par accrocher un minimum (j'ai vraiment failli laisser tomber pendant les 150 premières pages mais je n'avais à ce moment là rien d'autre à lire qui me fasse vraiment envie). Pour une analyse un peu plus poussée, voir ici.
Kerouac - Sur la route
Kesey - Vol au dessus d'un nid de coucous
Millhauser - La vie trop brêve d'Edwin Mullhouse, écrivain américain C'est assez space: en gros, c'est la biographie d'un écrivain fictif décédé à l'âge de 11 ans, par son meilleur ami du même âge. Les deux manuscrits ont été retrouvés tardivement par des universitaires (fictifs eux aussi). Oui, ça ressemble un peu au bouquin de Chevillard dont j'ai parlé plus haut, enfin chronologiquement c'est plutôt le bouquin de Chevillard qui ressemble à celui-la (1972 contre 1999, les deux devant beaucoup à Pale Fire de Nabokov, 1962, probablement le plus ambitieux et le meilleur des trois). Je ne sais pas trop quoi en penser, l'exercice de style, le jeu littéraire, est bien mené surtout quand on pense que c'est le premier livre de Millhauser, pas encore 30 ans à l'époque. Mais bon, au-delà de ça, sans estimer que tous les romans doivent avoir un message profondissime à faire passer, c'est assez vain, je trouve. J'ai également fini Martin Dressler, Prix Pulitzer en 1997, un livre sur l'épopée, de la grandeur à la décadence, d'un jeune entrepreneur américain, dans le New-York de la fin du 19ème siècle. C'est un livre assez éthéré, assez "old school", plutôt facile à lire mais qui ne m'a pas vraiment passionné.
Bradbury - Farhenheit 451 Impression mitigée: c'est la premiere fois, depuis que je lis en V.O., que j'ai l'impression qu'un livre est vraiment pas très bien écrit. Répétitions, longueurs, métaphores supers clichés etc. Il y a aussi des passages qui ne fonctionnent pas (le chien mécanique, j'ai trouvé ça assez naze). Par contre, l'idée de départ, à savoir que les gens, abrutis par la téloche, ont progressivement arreté de lire (a part les BDs et les tabloïds), ce qui a ensuite permis au gouvernement d'interdire les dits bouquins sans que ça choque personne ou presque, est super "clever", surtout quand elle est énoncée dans les années 50. Du coup, il y a dans le bouquin des prémices de la société actuelle, avec des gens qui ont 5 télés dans leur appart, et des émissions de "télé-réalité", et un monde qui tourne autour de l'"entertainment" immédiat sans jamais prendre le temps de la réflexion. De ce coté la, le bouquin est vraiment bien, et peut-etre plus "prophétique" que 1984. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi Fahrenheit est rangé au rayon SF chez nous, alors que c'est un livre d'anticipation dans la veine de 1984 ou Le Meilleur des Mondes.  
Lee - How to kill a mockingbird.

Selby Jr - Last exit to brooklyn ou Requiem for a dream.
Bellow - Ravenstein était tres chiant, il a sans doute fait mieux dans les vieux trucs.
Herbert - Dune
Asimov - Fondation
Toole - Jamais allé au bout de la Conjuration des imbéciles. De toute façon il en a écrit qu'un.
Wolfe - Acid test Intéressant historiquement, pour comprendre le milieu hippie aux US à la fin des années 60, la vie de Kesey (l'auteur du Vol au dessus d'un nid de coucou, voir plus haut), leader plus ou moins contre son gré du mouvement, leurs relations avec les beatniks et les hell's angels etc. Après, c'est un peu pénible à lire. Je tenterai peut-être Le bucher des vanités.
Auster -  J'ai enfin lu La trilogie new-yorkaise avec beaucoup de plaisir malgré une entrée en matière délicate. J'avais lu auparavant Travels in the Scriptoriumune nouvelle assez perchée mais qui m'a beaucoup plu. Difficile à résumer, mais c'est court, pas dur à lire, mi-polar, mi-fantastique avec moult interprétations possibles. Cela dit, je pense qu'on tourne assez vite en rond avec cet auteur: il a certes "crée" son univers, mais il ne semble plus en sortir beaucoup.
Proulx - Brockeback Moutain ou Cartes postales que j'ai chez moi
Ondaatje - Le Patient anglais (Canada)

Updike - grand écrivain "comique" (mais pas que), décédé récemment. Styliste et reconnu pour ses critiques littéraires aussi. Ses romans (nouvelles) les plus connues sont celles tournant autour du personnage Rabbit et celles sur l'écrivain Bech. J'ai lu le premier tome de cette dernière série, Bech: a book. Un peu compliqué pour moi en anglais. Un écrivain qui écrit à propos d'un écrivain qui souffre du blocage de l'écrivain. Méga métafictionnel donc, plein de références ou semi-private jokes qui ont dû m'échapper. Les chapitres sont en fait des petites histoires indépendantes, très vaguement reliées, et qui ont tendance à se répéter un peu. J'ai également lu Terroriste, son dernier roman. Un autre roman post-11 septembre (voir DeLillo, ci-dessous), qui raconte de façon plutôt efficace et crédible l'embrigadement d'un gamin déboussolé. Dommage que la fin sombre un peu dans le thriller bas de gamme.

Joyce Carol Oates - j'en ai lu cinq ou six ces derniers années et en ai parlé ailleurs. Ecrivain excessivement prolifique. J'aime beaucoup son univers sombre, dérangé. Zombi était franchement marquant, Viol, une histoire d'amour était pas mal aussi.

Don DeLillo -  écrivain américain très médiatisé, l'une des grandes figures contemporaines avec Oates, Roth etc. J'avais lu Chien galeux, l'un de ses premiers bouquins, un polar mou du genou qui m'avait plutôt ennuyé. Je m'étais ensuite attaqué à Libra, une fiction complexe sur la vie de Lee Harvey Oswald, que je n'avais pas finie. J'ai depuis lu L'Homme qui tombe, réflexion assez étherée sur le 11 septembre, qui ne me marquera probablement pas plus que ça malgré de jolis passages. Bref, je ne suis pas convaincu, même si ses oeuvres majeures sont paraît-il Underworld et White Noise. Un écrivain exigeant, mais je n'accroche pas.  
Palahniuk - J'ai lu un recueil de "non-fiction", qui regroupe des essais autobiographiques et des sortes de reportages journalistiques sur les tarés de l'Amérique (récit d'un festival annuel de sexe en plein air et en tout genre, tournoi annuel de batailles de moissonneuses-batteuses etc). C'est pas très bien écrit, à mon goût (trop journaliste), il y a cependant des réflexions intéressantes, mais globalement ça ne m'a pas emballé. J'ai enfin fini Snuff, son dernier dont le pitch était accrocheur: une actrice de porno en préretraite qui veut faire un retour fracassant en se faisant fracas... battant le record du gang-bang... Cette lecture confirme mon sentiment que finalement plus à un scénariste qu'à un écrivain (un grand nombre de ses bouquins ont donné lieu à des films plutôt bien accueillis). Le bouquin est raconté selon quatre points de vue différents, 3 des acteurs en attente d'aller tirer la pornstar, et la manager de l'actrice. C'est plutôt malin, mais d'un point de vue formel, les trois voix se confondent entre elles et, me semble-t-il, avec celle de Palahniuk, qui n'est pas un grand styliste. Après, c'est plutôt prenant, drôle et malsain même si la fin est assez débile.  A vous de voir.

McCann - (Colum) Let the great world spin très joli bouquin dont j'ai parlé ailleurs, qui m'a donné envie d'en lire plus de cet écrivain poétique. Depuis, j'ai lu This Side of Brightness, autre beau roman choral sur New-York.

Chabon - écrivain américain juif. Je précise parce que ses bouquins tournent beaucoup autour du judaïsme. J'ai lu "Gentlemen on the road", un bouquin d'aventure "à l'ancienne" ("à la Dumas", pourrait-on dire), sur des chevaliers errants dans un monde lointain, avec des princesses, un méchant usurpateur, tout ça. Classique, mais efficace, et assez drôle. J'ai ensuite lu Le club des policiers yiddish, plus sombre: un polar dans un monde parallèle (monde où les juifs n'ont pas fondé Israël mais se sont retrouvés en Alaska). Un peu dur à pénétrer, mais prenant une fois qu'on y est (a obtenu le Prix Hugo en 2008, même si à mon sens ça relève plus du polar que de la SF). 

Jonathan Safran Foer - Extrêmement fort et incroyablement près. Un livre assez perché sur un jeune autiste (plus Asperger que légume) et sur sa quête pour accepter et comprendre la mort de son père le 11 septembre. Cela m'avait plu, mais le bouquin militant sur le végétarisme m'excite beaucoup moins...

David Foster Wallace - J'ai lu une collection d'essais (A supposedly fun thing I'll never do again) assez bluffante, stimulante intellectuellement et à la forme assez caractéristique (quasiment plus de notes de bas de page que de texte) qui rappelle peut-être un peu Sterne. J'ai acheté l'un de ses romans, The Pale King, inachevé je crois (le bonhomme s'est suicidé) que je n'ai pas encore attaqué. Infiite Jest, son oeuvre la plus connue, est un énorme pavé.


- Chine:
Xingjian - la Montagne de l'âme, ou un autre.

Mo Yan - Un Prix Nobel, un snob comme moi ne peut pas laisser passer.


- Inde:
Naipaul - Le Masseur mystique son premier roman. Je suis un peu passé à côté, je ne l'ai pas vraiment lu au bon moment.


- Japon:
Kawabata - j'ai lu le joueur de Go, ça m'est passé un peu au-dessus et puis ce n'est pas vraiment un roman. A retenter
Mishima - c'est un pote au précédent, j'ai un de ses bouquins chez moi.
Oe - Je viens de finir une de ses nouvelles, c'est assez contemplatif, poétique, et ça fleure bon l'autobiographique. Un peu court pour dire si j'ai adoré ou pas, à réessayer sur un roman.
Soseki - Je suis un chat   Plutot chiant, et je pèse mon mot: on sent que c'est une collection de chapitres écrits dans un mensuel littéraire. Du coup, meme si le premier chapitre est pas trop mal, ça tourne tres vite en rond et présente certaines similitudes de ce point de vue la avec Bouvard et Pécuchet (avec un poil plus de fil conducteur mais des évenements encore moins intéressants). Et puis les tiraillements des intellectuels japonais au moment de la transition entre culture ancestrale et culture "occidentalisée", c'est un theme assez récurrent dans les romans japonais de cette époque (premiere moitié du 20eme) et je dois avouer que ça m'en touche une sans remuer l'autre. Il me semble enfin que le roman a pas mal inspiré certains passages de Kafka sur le Rivage de Murakami.

- Pérou:
Vargas Llosa - Après avoir lu l'essai sur les Misérables, j'ai lu la Fête au Bouc, "roman" historique décrivant la chute de Trujilo, le dictateur de République Dominicaine. J'ai adoré ce livre, prenant comme un polar. Comme souvent, ça m'a donné envie d'aller visiter le pays en question, même si je ne pense pas que ce soit le but.

- Argentine:
Borges - comme Naipaul, les quatrieme de couv' ne m'ont jusque là pas trop fait bander.

- Afrique du Sud:
Coetzee - J'en avais lu un qui ne m'a pas emballé, et depuis j'ai lu Journal d'une année noire dont le pitch m'a intéressé mais dont la lecture ne m'a laissé que peu de souvenirs... Je suis un peu maso, je me demande si je n'essaierai pas un jour En attendant les Barbares.

- Turquie:
Pamuk - Mon nom est Rouge, ou Neige.

- Israël:
Oz - Soudain dans la forêt profonde  Un conte pour enfants gentillet, même si dans le genre j'avais préféré Haroun et la mer des histoires de Rushdie, pour la multiplicité des niveaux de lecture. Enfin, c'est un peu court pour me fairre une idée.

 

 

 

Depuis 2010, j'ai "rayé" 11 écrivains de ma liste, soit environ 4 par an (sur mon quota typique de 25 bouquins lus/an). Je suis dans le rythme, si Dieu me prête vie, pour ne pas être trop loin d'en venir à bout un jour.

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4 janvier 2013 5 04 /01 /janvier /2013 16:15

Sans raison apparente, j'ai au cours des derniers mois lu un certain nombre d'autobiographies. Pas le genre suranné linéaire, exhaustif, et le plus souvent écrit par des nègres à propos de semi-people en fin de carrière (de Drucker à Ginola), mais plutôt des bouquins un peu ambitieux d'un point de vue littéraire ou un poil iconoclastes.

 

A savoir,

 

- J'ai réussi à rester en vie de Joyce Carol Oates

- Mes Vies d'Edmund White

- Le Poète russe préfère les Grands Nègres d'Edouard Limonov

- Life de Keith Richards

- Théorème Vivant de Cédric Villani

 

De façon assez amusante, il existe un certain nombre d'interconnexions (lointaines parfois, je le reconnais) entre tous ces livres.

 

Joyce Carol Oates raconte dans "A Widow's Story" (titre plus subtil que la traduction française...) la mort "subite" de son mari et éditeur, avec qui elle était mariée depuis plus de 50 ans, en 2008. Le livre est étrange, comme souvent chez Oates, dans la mesure où, ai-je trouvé, le mari est à la fois présent dans toutes les pages et complètement absent: il y a un petit côté "artificiel" dans la façon dont Oates expose son amour et son chagrin, ou peut-être trop "littéraire", idéalisée et intellectualisée, sans rien de concret. Bref, cela m'a laissé quelque peu dubitatif et je préfère de beaucoup ses romans dérangés, même si eux non plus ne filent pas la patate. Il est toutefois amusant de voir de près l'univers princetonien et sa faune (Oates y est Professeur de littérature), probablement aussi représentatif du "real world" que ce que peut être en France la rue d'Ulm ou la Sorbonne.

 

Ce qui m'amène au livre de Villani, notre dernier médaille Fields ou comme on l'a surnommé - à cause de son look assez personnel- le Willy Wonka des maths. Le livre est aussi déprimant qu'enthousiasmant, et parfois imbittable aussi: j'ai parfois eu l'impression en lisant certains passages pourtant censés être "explicatifs" d'être à la place de mes parents quand je leur parle de mon boulot... les côtés déprimants sont les passages du style "il y a 10 ans avec mon thésard" (alors que Villani à 35 ans au moment de l'action) ou ceux où on lui propose de diriger un établissement prestigieux (c'est là qu'on apprend que l'homme est loin d'être aussi "perché" qu'il peut en avoir l'air, et qu'il n'est ni dénué d'ambition personnelle - énorme- ni de sens politique). L'enthousiasme vient du fait que, de façcon plutôt bien écrite, on suit "la science en train de se faire" et le déroulement d'une carrière exceptionnelle. De façon assez amusante, Villani passe plusieurs mois à Princeton à peu près au même moment où Oates se remet de la mort de son mari (2ème semestre 2008 pour Oates, 1er semestre 2009 pour Villani).

 

Il se trouve également qu'Oates est une très bonne amie d'Edmund White, qui apparaît à de nombreuses reprises dans son livre en tant que l'un des proches sur qui elle s'est appuyée, et que celui-ci est aussi Professeur à Princeton. Dans Mes Vies, Edmund White se lance dans l'autobiographie, pourtant déjà très présente de façon assez transparente dans ses romans. "Ses vies", regroupées par "thématiques", ce sont celles d'un homosexuel américain bourgeois qui a vécu de nombreuses années en France. Là encore, j'ai préféré les romans (notamment le bouleversant la Symphonie des Adieux). Toutefois, on appréciera les évocations du New-York "destroy" des années 70 ou celles du Paris "intello" des années 80. Et on sera également surpris d'apprendre qu'un écrivain respecté et à l'allure vénérable n'aimait rien temps, il y a une dizaine d'années (donc à 60 piges bien tassées), que de se faire pisser dans la bouche ou de sucer son amant, de 30 ans plus jeune que lui, pendant que celui déféquait. Et après, on se croit libéré, open minded et tout... 

 

Ces évocations des 70's, 80's à New York ou Paris peuvent nous ramener aux vies de Limonov et de K. Richards. Limonov est un personnage dont j'ai entendu parler en lisant sa "biographie" par E. Carrère. C'est un homme qui a eu une vie extraordinaire, ou plutôt dont on a l'impression qu'il a eu 10 vies condensées en une seule: délinquant ukrainien, poète underground soviétique, semi-clochard new-yorkais, serviteur d'un milliardaire américain, écrivain et journaliste branché parisien, soldat en Serbie, dissident puis prisonnier russe et dirigeant d'un parti nationaliste d'opposition, aujourd'hui has been, etc. Une espèce de phoenix et de "loser magnifique"... le succès du roman de Carrère a fait que ses bouquins ont été réédités en France, le Poète russe étant son premier, décrivant ses années de dèche à NYC à la fin des années 70, à l'époque ou c'était une ville dangereuse, et sa découverte de l'homosexualité auprès de clochards noirs en réaction à la rupture d'avec sa femme, le quittant pour des semi-mondains dans l'espoir de faire partie de la jet-set. Le personnage est aussi torturé que sa vie ne l'a été, le livre est à cette image, complètement foutraque, écrit quasiment sur le vif comme un journal intime. Manifeste anarchiste, foi en son destin, complexe d'infériorité, mégalomanie, obsession sexuelle teintée visiblement d'impuissance, romantique et haineux... on s'y perd. Le mérite du livre de Carrère était de remettre un peu tout ça dans l'ordre pour en faire un excellent livre, mais je pense que je lirai un jour Histoire de son serviteur.

 

En parlant de 10 vies en une, Keith Richards semble comme les chats en avoir 9. On dit de lui "I picture nuclear war and two things surviving: Keith and cockroaches" (j'imagine une guerre nucléaire et deux survivants, les cafards et Keith). Son autobiographie (écrite avec l'aide d'un nègre dont on ne sait s'il est grand) les décrit une par une, un peu dans le désordre. Si l'histoire du rock vous botte, si le n'importe quoi des 70's vous intéresse, c'est à lire et ça vous donnera envie d'écouter de très vieux groupes et de vous refaire les premiers albums des Stones tout en ayant droit à la génèse de leurs plus grandes chansons. On a aussi droit à la version de Richards de ses relations avec Jagger, ultra-créatives et complices au début, exécrables depuis le milieu des années 80... l'estime se mêle à l'incompréhension, l'amitié à la haine. Et vous saurez tout sur la chute du cocotier...

 

 

 

 

PS: Ah, et puis tant qu'il est temps, bonne année, meilleurs voeux, et à bientôt, votre serviteur partant en conférence en Californie pour une petite semaine (sans rien à présenter qui plus est), histoire de reprendre un peu en douceur. 

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20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 11:50
Je profite d'une légère accalmie pour prendre le temps de vous conseiller la lecture des romans de Colum McCann.
 
McCann est un écrivain d'origine irlandaise, naturalisé américain.
 
J'avais déjà dit ici tout le bien que je pensais de son dernier roman, Let the Great World Spin, National Book Award en 2009.
 
J'ai depuis lu l'un de ses premiers ouvrages, This Side of Brightness (1998, son deuxième roman).
 
Malgré les 11 ans qui les séparent, on y trouve bien des similitudes qui constituent je pense, prises ensemble, l'originalité de la voix de l'auteur:
 
- goût pour des évènement marquants de l'Histoire américaine a priori peu propices au roman. Et pour mêler la "grande" Histoire à la petite, celle des personnages.
- roman "choral", racontant plusieurs histoires sur différentes périodes, donnant la parole à plusieurs narrateurs, le tout se recoupant au fur et à mesure pour former une unité.
- intérêt pour les "deshérités" (prostituées, junkies, sans abris) sans misérabilisme mais avec empathie.*
- poésie de l'écriture, capacité à trouver l'humanité dans des situations a priori sordideset à les restituer de façon délicate, presque onirique.
 
Je ne sais pas ce que ça donne traduit, mais ce n'est pas excessivement dur à lire en anglais et ses romans se trouvent facilement.
 
Zoli et Dancer me tentent pour l'instant moins, mais je lirai certainement Songdogs dans un futur plus ou moins proche, en attendant le prochain.
 
 
A mon humble avis, un écrivain majeur d'aujourd'hui (dans la catégorie "plutôt jeune avec sa propre voix qui deviendra probablement une figure tutélaire dans 20 ans").**
 
 
 
 
* Il est connu pour préparer ses romans "en immersion". On peut sans doute le critiquer (comme on peut par exemple critiquer les bourgeois qui sont allés dormir deux jours dans les tentes au Canal Saint-Martin, à l'époque des fameux Enfants de Don Quichotte), mais c'est peut-être aussi pour ça que ça sonne juste.
 
** Si j'étais aussi impulsif qu'il y a quelques années, je vous dirais que c'est quand même autre chose que David Foenkinos (qui niveau "immersion" n'est probablement jamais allé plus loin qu'un week-end en province, et dont les romans sont aussi originaux qu'un lifting à Saint-Germain et aussi bien écrits qu'une chanson de Carla Bruni), mais j'ai mûri et je ne donne plus dans le tacle gratuit.
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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 17:21

Je lis actuellement "Nice Work", de David Lodge, l'un des auteurs dont les livres occupent régulièrement ma table de nuit et mon sac à dos. 

 

Sans raison apparente, Nice Work était l'un des rares romans de Lodge que je n'avais pas encore lu.

Il fait partie d'une trilogie (voire tétralogie, depuis la sortie de Thinks) dite "de Rummidge": Rummidge étant une version fictionnalisée de Birmingham, ville des Midlands fleuron de la révolution industrielle ayant subi de plein fouet la désindustrialisation de l'Angleterre, et où Lodge a travaillé jusqu'en 1987.

 

Plus généralement, l'oeuvre de Lodge fait partie de, et a contribué à populariser, la branche romanesque dite de l'"academic novel", catégorie typiquement anglo-saxonne (je serais bien en peine de donner un exemple de roman français en faisant partie - il n'y a d'ailleurs pas de page Wikipédia correspondante). 

Lodge a lui-même été universitaire pendant une bonne partie de sa vie avant de se consacrer pleinement à l'écriture et continue d'ailleurs à écrire aussi des essais de vulgarisation de théorie littéraire, fort intéressants pour le néophyte.

 

Comme d'autres professeurs ou personnes évoluant dans le milieu académique, j'apprécie de temps à autre des romans de ce style, que ce soit Moo (Jane Smiley), Straight Man (Richard Russo), l'oeuvre d'Alison Lurie ou celle de Lodge, donc.  

Il faut peut-être y voir une certaine tendance sectaire, et force est d'admettre que la majeure partie de mes relations est issue du milieu académique (je tolère la fréquentation d'ingénieurs, surtout s'ils ont un PhD, et j'avoue avec quelque honte être ami avec au moins un financier). Récemment, j'ai d'ailleurs lu Solar, de McEwan, un "academic novel" à sa sauce (qui vire au thriller, avec des personnages pas très sympathiques embarqués dans des histoires qui les dépassent complètement), qui n'a semble-t-il plu qu'à moi...

Plus sérieusement, un peu comme Big Bang Theory, la description romancée et distanciée du petit monde de la science a le potentiel pour plaire à beaucoup de monde, mais il faut reconnaître que certains sous-entendus, certaines subtilités, résonnent évidemment plus particulièrement pour ceux qui y baignent (rien de grave: si je lis le Bûcher des Vanités, je suppose que certaines choses vont m'échapper aussi, sans que cela ne m'empêche forcément d'apprécier le livre).

 

Bref.

 

L'action de Nice Work se passe en 1986, donc au plus fort des années Thatcher.

 

Rummidge est un Birmingham de fiction, mais comme dans la réalité, les usines (manufacturing, automobile...) ferment à qui mieux mieux, le taux de chômage explose, la délinquance et le vandalisme aussi, et l'immigration est ghettoïsée et stigmatisée.

Ca ne vous rappelle rien?

 

Les Universités font face à des coupes budgétaires et réorganisations sans précédent, les recrutements sont gelés. Une certaine frange du public méprise les universitaires et se plaint de leur inutilité, de leur "non-production de richesses".

Ca ne vous rappelle rien?

 

Certains personnages du livre qui considèrent que vie réussie rime avec beaucoup d'argent et/ou beaucoup de signes extérieurs de richesse, ça ne vous rappelle rien?

 

Il y a aussi des passages qui, sans être actuels, permettent d'éclairer des problèmes qui le sont (la décision de déplacer les forces vives de l'économie du secondaire vers le tertiaire, ou la dérégulation financière, par exemple).  

 

 

Quelques extraits, pour être plus précis:

 

-  "Teachers are just seating around in their warm staff rooms, chewing the fat. It's about time they started to act as professionals".

L'expression "y a de la lumière et c'est chauffé" a encore de beaux jours devant elle, 25 ans après.

 

- "My field is the nineteenth century novel" "They give degrees for that? Why aren't they studying something useful?" "Because they're more interested in ideas, feelings, than in the way machines work" "Ideas, feelings won't pay the rent" "Is money the only criterion?" "I don't know a better one".

 

- "Professors have got jobs for life?" 

 

- "Why should my workers pay taxes to keep middle-class youths in too confortable college so they never want to leave it to do a proper job?"  

 

- "Society undervalues engineers and engineering"... "Maggie is absolutely right: the future for our economy is in service industries and perhaps some high tech technologies"... " There will be some kind of change in the rules  of the Stock Exchange that will allow people like me to make even more money than they do actually"...

 

- "Immigrants from India, Pakistan, Caribbean drawn here in the boom years when jobs were plentiful, and now bearing the brunt of high unemployment". "Angleside is the black ghetto of Rummidge where youth unemployment is 80%. The only job vacancies are for interviewers in the Social Security office, where the furniture is screwed to the floor in case the clients should try to assault the interviewers".

 

- "Her research fellowship was coming to an end, and she could not bear hanging on for another year as a freelance supervisor of undergrads, sponging on her parents. She began to look for a university job outside Oxbridge. But there were no jobs. The Conservative Government, elected with a mandate to cut public spending, had set about decimating the national system of higher education. Universities were required to reduce their academic staff by anything up to 20%, persuading as many people as possible to take early retirement and freezing all vacancies.".... "A three year lectureship was advertised, she applied, was interviewed along with four other equally desperate (aujourd'hui ce serait plutôt 40, NdMix) and highly qualified candidates, and was appointed"...  "We will regret losing you: the only way we can meet our target is an absolute freeze. It's very hard for young people in your positions".

 

- Pour la bonne bouche, le jargon administratif ne date pas d'hier et n'est pas propre à nos contrées. Ni s'en moquer: "The DES through the UGC have urged the CVCP to ensure that universities across the UK make a special effort in the coming year...".  

 

- La pratique de la grêve à l'Université par les chercheurs, disons souvent un peu cavalière, est aussi visiblement un classique: "the University had been obliged to circulate all members of staff with a memorandum asking them if they had been on strike to volunteer the information (since there was no other way of finding out) so that their pay could be docked. It was rumoured that the number of staff who had responded was considerably smaller than the number of participants in the strike".

 

 

 

Pour conclure, c'est un des très bons D. Lodge, où il applique un certain nombre de ses recettes typiques, parfois un peu artificielles, pour mettre en place une comédie de moeurs et sociale laissant pas mal de place au "food for thought". Comme souvent, il joue beaucoup avec la métafiction* et l'intertextualité** (de façon mieux assumée que J. Macé-Scarron), ce qui donne de nombreux de niveaux de lecture que j'apprécie toujours beaucoup chez lui (je trouve qu'il arrive à faire se sentir le lecteur intelligent, ce qui est une sensation pas désagréable).

 

 

 

 

 

 

* le personnage de la Prof. de lettres est introduit en expliquant qu'elle-même ne croit pas à la notion de "personnage" dans un roman

 

** le roman est globalement un pastiche du roman industriel que la Prof. de Lettres enseigne (et qu'elle "vit" donc, dans l'histoire de Lodge).

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6 septembre 2011 2 06 /09 /septembre /2011 11:19

J. Macé-Scaron, essayiste-journaliste-romancier-chroniqueur-polémiste-critique-analyste politique universel comme les media français adorent les produire*, a reconnu avoir**, dans son dernier roman récompensé par la critique*** quasiment textuellement reproduit des passages d'un ouvrage de Bill Bryson, auteur américain de romans de voyage à tendance comique.

 

Macé-Scaron s'est ensuite défendu, avec un certain panache d'ailleurs, en évoquant notamment le concept d'intertextualité.

Terme un peu flou, théorie littéraire exprimant l'idée que chaque nouvelle oeuvre littéraire se nourrit d'oeuvres antérieures. C'est tellement vaseux et générique, "tout le monde le fait, au moins inconsciemment" qu'on ne peut qu'acquiescer et y voir avant tout une pirouette.

Mais soit, après tout le plagiat est lui aussi difficile à définir, même juridiquement...****

 

Hélas, comme souvent, tout s'enchaîne: voilà Macé-Scaron accusé maintenant d'avoir recopié des portions d'articles de collègues dans les siens. Les extraits donnés sont assez édifiants.

 

Question: l'intertextualité est-il un concept adaptable au journalisme?

 

 

 

 Le copieur, s.d. AD Oise, fonds Charles Commessy, 5 Fi 512

 

 

 

* lui est dans le rôle du centriste-anti-sarkozyste-gay-tatoué cool, pour aller entre Zemmour, le pas cool-misogyne-misanthrope de droite et Naulleau, le péremptoire de gauche (on peut citer aussi Barbier, Rioufol, Domenach etc). 

 

** pas spontanément, hein: disons qu'il n'a pas nié l'évidence, une fois que les journaux se sont mis à mettre en parallèle les différents extraits des deux ouvrages. Pour la petite histoire, cela aurait été révélé grâce à une lectrice, qui, totalement par hasard, aurait lu les deux livres l'un après l'autre.

 

*** constitué d'amis parisiens fréquentant les mêmes salons (ici, la brasserie la Coupole, qui donne son nom au prix) et eux aussi souvent multicartes.

 

**** Laurens a accusé Darrieussecq de plagiat psychique, Christine Angot de vampirisme pour son dernier livre, Houellebecq reconnaissant avoir "emprunté" des textes à Wikipedia, etc. Il faut dire que la France n'est pas l'Allemagne, où un ministre mis en cause pour plagiat voit sa carrière ruinée illico.

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18 juillet 2011 1 18 /07 /juillet /2011 10:35

J'ai déjà abordé il y a plus de trois ans la thématique de la traduction, du passage "V.O." "V.F.", donc il y aura peut-être des redites et ou contradictions.

Mais:

- j'ai, comme mes lecteurs, la flemme de me (re)lire.

- je revendique le droit à dire tout et son contraire à 3 ans d'écart comme le premier analyste sportif ou politique venu. 

- le sujet stimule mon intellect (n'ayons pas peur des mots).

- les administratifs et les élèves commençant enfin à partir en vacances, j'ai la paix plus de 7 minutes d'affilée.

 

Aujourd'hui donc, petite tentative de réflexion au travers d'un écrivain aussi majeur que productif, Joyce Carol Oates.

 

En très résumé, Oates a un goût prononcé pour les ambiances ou situations glauques et la violence, psychique et physique.

 

Elle a notamment écrit deux romans où le narrateur est un tueur en série.

L'un, "The triumph of the spider monkey", est inspiré par la vie de Charles Manson, et a été écrit en 1976. L'autre, "Zombie", est sorti en 1995 et se base vaguement sur le personnage de Jeffrey Dahmer, deux des plus célèbres serial killers américains, donc.  

 

J'ai lu le second il y a quelques temps, en anglais. Et le premier dernièrement, cette fois-ci en français.

Si j'avais été scotché par Zombie, prenant, malsain, crédible (pour autant que je puisse imaginer la psyché d'un serial killer), j'ai trouvé The Spider Monkey déroutant et globalement peu accrocheur, notamment du fait d'un style (que j'imagine volontairement) difficilement compréhensible: phrases sans queue ni tête, situations mal explicitées, absence de structure du récit avec sauts temporels, etc.

 

Se peut-il que cette différence de ressenti*, pour deux romans "proches" (même auteur, même thématique, traitement similaire) soit majoritairement dûe à la traduction?

Ou l'un est-il objectivement plus réussi que l'autre, ne serait-ce que parce qu'il y a 20 ans d'écart, et donc d'expérience en plus pour l'auteur, entre les deux (comme entre Lolita et l'Enchanteur - qui n'est guère plus qu'un "premier jet" du roman culte-, de Nabokov)?

 

Pour essayer d'apporter une réponse, il faudrait sans doute que je relise Spider Monkey en version originale. Puis que j'enchaîne avec Zombie, pour une comparaison plus directe. Et que je finisse par Zombie en français pour voir le traitement qui lui a été réservé.

Autant dire que je n'ai pas que ça à foutre.

Et que ce ne serait dans certains cas de toute façon pas envisageable: j'aime beaucoup le caractère onirique, romantique et poétique des romans d'Haruki Murakami, mais je ne vais pas aller apprendre le japonais pour m'assurer de leur qualité originale. Je me contente de remercier son traducteur attitré (Corinne Atlan) pour son travail que j'imagine colossal.

 

On peut cependant évoquer certains aspects qui peuvent rendre la traduction anglais-français difficile.

- le "courant de conscience" où quand l'écriture tente de reproduire la pensée qui vagabonde. Le procédé ne me dérange pas trop en anglais, mais il me semble assez inadapté au français: je pense que c'est parce que l'anglais est une langue peut-être moins riche mais plus malléable, où la différence entre l'écrit et le parlé/pensé est donc moindre. Un roman anglo-saxon écrit "comme on parle" peut être parfaitement naturel. Au contraire, un "français parlé" à l'écrit est toujours, je trouve, quelque peu artificiel.

- l'inverse est probablement aussi vrai: je n'ai pas feuilleté les traductions anglaises de Proust, très respecté outre-Atlantique, mais je me demande comment il est possible de rendre dans une grammaire qui privilégie les phrases courtes et simples de type sujet verbe complément les écrits alambiqués et les phrases de 20 lignes à 6 subordonnées du père Marcel.

- de façon générale, les jeux complexes sur le style, comme ceux que pratiquent Martin Amis, sont probablement une gageure: je n'ai rien compris à Chien Jaune en français, mais mes limitations en anglais font que je n'aurais probablement pas compris plus en version originale. Cela dit, dans le cas d'espèce cela vient peut-être du roman lui-même: il semble que la critique anglaise n'a pas vraiment compris non plus

 

Pour conclure, revenons à nos examples Oatesques:, sans être vraiment dans le cadre du courant de conscience, on lit le récit à la première personne d'un cerveau malade et meurtrier (dans le cas de Zombie, c'est un "journal intime", dans le cas de The Spider Monkey, c'est plus vague: souvenirs, défense lors du procès, récits d'entretiens psychiatriques etc): c'est donc une expérimentation littéraire, où le traducteur va avoir un gros travail pour intuiter et respecter les buts de l'auteur**.

 

 

 

 

 

* Pour le bien de la rhétorique, on négligera ici de façon totalement fantaisiste la probable différence d'état d'esprit du lecteur entre ses deux lectures.

 

** Bref, on n'est pas ici dans la traduction d'un Kay Scarpetta écrit en roue libre par Patricia Cornwell ou dans le tome 158 des oeuvres de Stephen King, où n'importe quel bilingue sachant construire une phrase sera capable de proposer une traduction honorable.

 

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16 juin 2011 4 16 /06 /juin /2011 17:03

Comme beaucoup d'autres choses, le petit milieu de la littérature française contemporaine semble bien sclérosé pour que:

- l'on jase depuis près de 10 ans sur l'insoumission d'A. Robbe-Grillet (le pape du Nouveau Roman dont les oeuvres ont déjà été largement oubliées par le public 5 ans après sa mort) qui fit tout pour ne pas siéger à l'Académie Française où il venait d'être nommé*.

- le Monde ponde une page sur les 15 minutes de retard de F. Weyergans à la même Académie pour sa réception.

- un écrivain soit médiatisé pour sa conduite déplorable plutôt que pour ses écrits: Weyergans a fait jouer des réseaux pendant deux ans pour être nommé à l'Académie, puis, une fois élu, à subitement fait la coquette -ou le rebelle de salon- en retardant de deux ans son intronisation, avant de se permettre d'arriver en retard.

Pathétique, mais l'important est que ça fasse causer dans les journaux et les dîners en ville.

 

Pas étonnant qu'il n'y ait plus que de l'auto-fiction et qu'on ne sache plus qu'écrire sur les partouzes, quand on en est à se tirlipoter le schmilblick entre soi à ce point...

 

http://www.lemonde.fr/culture/article/2011/06/16/francois-weyergans-en-habit-vert_1537108_3246.html#ens_id=1537109

http://www.liberation.fr/culture/01012343512-trois-hommes-dans-un-fauteuil

 

Le caractère unique de Saint-Germain-des-Prés est probablement ce qui pouvait arriver de mieux à la littérature anglo-saxonne...

 

Heureusement que quelques petits jeunes, Laurent Binet ou Vincent Message par exemple, semblent apporter un petit vent de fraîcheur.  

 

 

* Dans le même style, Paul Valéry s'est sans doute cru très malin en dégommant de façon "subtilement évidente" le prédécesseur de son siège, Anatole France, symbole pour les modernistes du conservatisme littéraire le plus bourgeois, dont il était censé faire l'éloge comme il est de coutume. Quel courage dans l'ironie mordante.
http://www.academie-francaise.fr/immortels/base/academiciens/fiche.asp?param=550
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8 juin 2011 3 08 /06 /juin /2011 09:58

Il y a un blog, découvert par hasard*, que j'aime bien, qui ne fait pourtant a priori pas vraiment partie de mon univers: il ne parle pas de science, pas de bouffe (à part le McDo), pas de musique. Il parle beaucoup de littérature, mais souvent de types qui me sont étrangers (bds, mangas, comics, SF...), de jeux vidéos (j'ai arrêté aux débuts de la PS2), des petites misères de la vie étudiante (ça fait quand même 7-8 ans que j'ai eu mon diplôme d'ingé), etc.

Mais, malgré cette dichotomie quasi-exclusive, ça fait partie des 10 blogs que je consulte régulièrement depuis environ un an, ce qui est assez rare pour être souligné.

Pourquoi? La personnalité de l'auteur telle qu'elle transparaît dans ses écrits, peut-être, son style assez catchy aussi. Et puis, sa "jeunesse", qui permet de nourrir virtuellement mon syndrome Peter Pan.

 

Bref.

 

Il y a peu, l'auteur du blog recommandait One Day, roman de Dave Nicholls. Sorti en 2009, il vient d'être traduit en français et on peut donc le trouver sur tous les promontoires Fnac.

Amateur féru de littérature anglaise contemporaine, n'ayant pas grand chose de captivant sur le feu, j'ai profité d'une visite chez WH Smith pour me l'acheter en V.O. (et surtout en poche parce que 25 euros dans un bouquin, faut pas déconner, sauf cas exceptionnel).

Puis, quelques semaines plus tard, je l'ai lu.

 

N'y allons pas par quatre chemins, j'ai trouvé que c'était de la merde en boîte.

 

Quelques détails maintenant:

 

First of all, rarement des personnages m'avaient autant agacé.

 

Généralement, les romans qui me les brisent menu sont commis par une certaine bourgeoisie incapable de regarder autre chose que son nombril, de parler d'autre chose que de ses petits problèmes de riches et de ses médiocres histoires de fesses, complètement insensible à la "réalité" du monde qui les entoure, qu'elle ne connaît de toute façon pas.

Un bon roman n'est pas forcément un manifeste historico-politico-économico-social à vocation universelle, mais il y a aussi des limites à l'onanisme, fut-il intellectuel.

Au tournant du 20ème siècle, les tenants de cette littérature boursouflée, très parisianiste, contente d'elle même sous un pseudo-vernis de dérision, sont Jean Cocteau, Raymond Radiguet (qui a au moins eu le bon goût de mourir jeune), Colette, etc.

Il y a ensuite eu une migration de Montparnasse vers Saint-Germain-des-Près, puis éventuellement vers certains coins du 16ème ou de Neuilly dont j'ignore l'existence, mais cette caste très franco-française existe toujours: les versions modernes des rebelles des beaux quartiers sont Emma Becker ou Lolita Pille, qui surmontent leurs problèmes existentiels de gosses de riches en racontant par écrit et in extenso leurs soirées "sodomie et coco" (pour la version quinqua, voir Houellebecq ou Angot).

Du grand art sûrement, et idéal à commenter au Flore, mais moi je m'en branle: j'irais même jusqu'à dire que la vacuité d'une existence érigée en manifeste artistique et portée aux nues par une critique consanguine m'irrite (le fondement).  

 

Je n'avais encore jamais vu d'exemple de roman à ce point self-absorbed chez nos amis anglo-saxons - un bon point pour eux-, c'est désormais chose faite. En version plus populo, certes.  

 

Donc, les deux personnages sont franchement insupportables:

- lui est purement et simplement "obnoxious": fils de bonne famille, beau gosse, oisif, inculte, inepte, content de lui.

- elle est ce qu'on appelle outre-Atlantique une "whiny bitch". Jamais heureuse, toujours à pleurer sur son sort, trop grosse, trop moche, trop célibataire, pas avec le bon mec, pas assez ci, pas assez ça, etc.

On est censé les suivre évoluer sur quasiment 20 ans, et on sent que l'auteur essaie de nous vendre leur maturité progressive, mais c'est un ratage complet, et ils restent en fait profondément les mêmes qu'à 18 piges: deux petits cons que je n'avais absolument aucune envie de connaître.

Alors, on peut kiffer un roman dont le héros est insupportable, mais il faut quand même que ça soit voulu par l'auteur (la Conjuration des Imbéciles, par exemple). Ici, il m'a semblé comprendre que les personnages sont censés être sympathiques, ou en tout cas le devenir au fur et à mesure... 

 

Même au-delà des personnages, leur histoire d'amour et d'amitié est également totalement creuse et absolument non crédible:

- un mec comme ça ne tombe jamais amoureux d'une fille comme elle.

A-t-on déjà vu un crétin semi-mondain obnubilé par son image et pensant avec sa bite dans les bras d'une "girl next door" mal fagotée? Peut-être, mais pas plus d'une nuit.

A-t-on déjà vu un crétin semi-mondain, alcoolique et qui pense avec sa bite, entretenir pendant dix ans l'amitié platonique d'une instit' de province chiante à mourir et donneuse de leçons?

Womanizer et "amitié homme-femme" me semblent deux concepts antinomiques, surtout si la gonzesse est une cruche (dans les Liaisons Dangereuses, ça passe). Du coup, leurs rencontres-retrouvailles dans les bars branchés sont largement aussi réalistes que les vaudevilles de Feydeau.

- Mais soit, admettons: la littérature, comme Closer et Voici, peut être là pour vendre du rêve. Je ne demande rien mieux que de croire à leur histoire si des éléments tangibles venaient m'y aider.

Là, rien. Visiblement, leur histoire commence par un coup d'un soir pré-remise des diplômes, même pas consommé.

Le couple, et ce dès le départ, semble n'avoir jamais rien à se dire, à part se balancer des pauvres vannes tellement écrites que même un épisode du Saturday Night Live paraît improvisé en comparaison.

Alors comme ils n'ont rien à se dire, ils passent leur temps à se sourire (la pauvreté stylistique et psychologique du roman est caractérisée par l'emploi à 1658 reprises du verbe "to grin" et de ses dérivés).

Même le climax décrivant la journée clé qui a tout fait naître est d'une médiocrité abyssale: ils se baladent presque sans un mot, font la sieste, se tripotent vaguement en échangeant trois poncifs sur le temps qu'il fait et le futur, rentrent pour baiser et sont interrompus par l'arrivée des parents du mec.

Peut-être que le coup de foudre existe, encore faut-il qu'il y ait quelques connections profondes à un moment ou à un autre pour que ça perdure, surtout lorsque les chemins ont toutes les raisons possibles de se séparer (ils sont diamétralement opposés en terme de carrière, de goûts artistiques, d'amis, d'opinions politiques...). J'ai du mal à accepter que sourires béats et un peu de chambrage suffisent à combler une relation de deux décennies: ici, on saura juste, pendant tout le livre, qu'ils se sentent bien quand ils sont ensemble, et que quand ils ne sont pas ensemble c'est pas pareil. Super, mais un peu court pour tenir 400 pages (parce qu'en plus, c'est long). 

 

Je passe sur les ficelles grosses comme les câbles du pont de Brooklyn (l'épisode de la "bouteille échangée" m'a profondément marqué, mais on peut aussi citer la déclaration d'amour qui aurait pu tout changer mais à deux minutes près finit sur le répondeur, etc), sur les clichés éculés utilisés de façon éhontée (le voyage initiatique en Inde, la découverte de Paris bohême - le 10ème arrondissement...- et l'histoire d'amour avec un mec qui s'appelle Jean-Pierre - sans déconner...), sur les emprunts à peine déguisés (si l'épisode du mariage où la nana un peu trop grosse arrive en retard et a des tâches de transpiration sous les bras, c'est pas du Bridget Jones...) et sur le dénouement tire-larmes à deux sous et jamais vu (p'tain, pile-poil quand ils réalisent qu'en fait ils sont faits l'un pour l'autre et qu'ils commencent à être heureux, paf, elle crêve comme une merde**).

 

Mais alors, pourquoi l'as-tu fini, connard?

Bon, déjà, j'ai expliqué ailleurs que, depuis quelques années, je finissais quasiment tous les livres que j'avais entamés au-delà de la page 20 (exceptions notables: Microfictions de Jauffret, et Vente à la criée du lot 49 de Pynchon).

Et puis, le procédé narratif est lui plutôt original: chaque chapitre décrit la journée anniversaire de leur rencontre, depuis celle-ci jusqu'à 20 ans plus tard. Cette journée, souvent banale, permet de faire le point sur leur relation, et est généralement racontée "des deux côtés", c'est-à-dire en décrivant successivement les tenants et aboutissants pour les deux personnages.

Et enfin, ça se lit plutôt facilement: c'est énervant, mais pas exigeant. Pour faire caca, ça vaut largement l'Equipe.

 

Mais quand même, avec 10 euros, je vous conseillerais d'acheter autre chose (comme le suggère un commentaire, 10 numéros de l'Equipe, douze rouleaux de PQ, un CD de Manowar, ou même un bon livre***).

Quant à moi, trop tard, on peut pas gagner à tous les coups.

Tout cela reste bien sûr extrêmement subjectif: pourquoi, au fond, ce bouquin qui a eu d'excellentes critiques -entre autres, de Nick Hornby dont j'apprécie souvent les goûts- n'a-t-il pas fonctionné avec moi?

 

En tout cas, une bonne critique vacharde et totalement gratuite, ça faisait longtemps et ça fait du bien. Donc, quelque part, merci à Dave Nicholls qui m'a permis de penser à autre chose qu'à l'administration.

 

 

 

* sur un autre blog que je lisais à l'époque, l'auteur disait du mal de David Foenkinos, ce qui m'a tout de suite incité à cliquer sur son lien.

 

** désolé d'avoir spoilé ce qu'on sent venir à 3 kms pour ceux qui avaient encore envie de le lire. Et puis, c'est même pas la toute fin. Non, on doit encore se taper la dépression du mec, après.

 

*** dans le registre love story impossible, on peut par exemple citer "Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil" de Murakami.

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5 avril 2011 2 05 /04 /avril /2011 10:27

Je viens de finir les Compagnons de Jéhu, premier élément de la dernière trilogie romanesque d'Alexandre Dumas (avec les Blancs et les Bleus, qui est une préquelle, et le Chevalier de Sainte-Hermine), écrite de 1857 à 1869, soit quasiment jusqu'à sa mort.

Cette trilogie marque le retour à "l'Histoire de France vue par Dumas" après quelques années de pause suite à la fin de la tétralogie révolutionnaire (Joseph Balsamo, le Collier de la Reine, Ange Pitou, la Comtesse de Charny), et après la séparation d'avec son "fameux" nègre, Auguste Maquet.

 

J'ai bien sûr parlé ici de mon amour pour Alexandre le grand, dont j'ai lu, outre les ouvrages mentionnés ci-dessus, la saga des Trois Mousquetaires (les Trois Mousquetaires, Vingt ans après, le Vicomte de Bragelonne), la trilogie sur la Renaissance et la chute des Valois (la Reine Margot, la Dame de Monsoreau, les Quarante-Cinq), le Comte de Monte-Cristo, et les Mémoires (1er tome).

 

Mais je crois que je n'avais jamais fait un article "solo" sur cet écrivain génial, l'inventeur du suspense de bas de page, l'homme payé à la page au talent si exceptionnel que n'importe quel amateur de G. Musso ou de F. Guène finira les mille pages du Comte de Monte-Cristo en moins d'un mois, le conteur fantastique qui parviendra à vous vendre ses parties de pêche à Villers-Cotterêts quand il avait sept ans comme le récit d'une aventure incroyable impossible à lâcher avant de l'avoir terminée.

 

Donc, voila, il m'a fallu à peine plus de 15 jours pour finir les Compagnons de Jéhu et ses 600 pages, malgré un emploi du temps chargé qui m'empêchait de consacrer beaucoup de temps à la lecture, et bien que ce soit à mon goût une oeuvre assez mineure du maître.

Mais un Dumas moyen, un peu bordélique, cousu de fil blanc, aux personnages un peu bâclés, reste plus captivant que n'importe quelle bouse du Nouveau Roman

 

Tiens, à ce propos, un hasard étrange du calendrier: La semaine dernière était diffusé l'Autre Dumas sur Canal Plus, justement sur la relation étroite et tumultueuse entre Dumas et Maquet. Le film, un peu gâché par une romance pas très intéressante (je ne suis pas un grand fan du jeu de M. Thierry), présente cependant assez subtilement des anecdotes historiques (les figurines dont Dumas se servait pour écrire trois romans en même temps, sa passion pour la bouffe, son engagement politique, etc).

Il prend plutôt la défense de Maquet, présenté comme pusillanime mais indispensable (et joué par un étonamment sobre Poelvoorde), face à un Dumas en mode "gros con", joué par notre Gégé Depardieu national en roue libre et affublé d'un postiche ridicule. De ce que je sais, le côté "larger than life" du personnage n'est pas forcément usurpé, mais il est ici rendu avec si peu de nuances qu'on se croirait chez Groland.

Indispensable, Maquet ne l'était pas: Dumas a connu le succès, avant, et après leur collaboration. Maquet, seul, a vécu de sa plume, mais n'a rien écrit de "mémorable".

Cependant, il faut admettre que les meilleurs livres de Dumas ont été écrits avec Maquet.

Après avoir lu les Compagnons de Jéhu, je pense que ce que Maquet apportait vraiment, c'était une certaine forme de rigueur: découpage des scènes, plan de l'intrigue, digressions mieux maîtrisées, etc. Dumas, qui faisait toujours 10 choses à la fois, avait besoin d'un "besogneux" pour cadrer sa faconde et, paradoxalement peut-être, lui donner plus de force.

Le Vicomte de Bragelonne, qui marque la fin de leur collaboration, ou les Compagnons de Jéhu sont un joyeux foutoir, où les personnages changent de nom, de titre, d'âge ou de rôle d'un chapitre à l'autre, où les sous-intrigues et les anecdotes se multiplient et les rebondissements arrivent comme un cheveu sur la soupe.

La puissance évocatrice, l'"entertainment", sont toujours là. Mais ce qui fait la force particulière du Comte de Monte-Cristo ou des Trois Mousquetaires, c'est aussi la maîtrise du récit.

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