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  • : La vie au labo
  • : Les pensées - j'ose le mot- diverses d'un jeune scientifique ayant obtenu un poste académique à l'Université, après presque trois années en post-doctorat dont deux au fin fond du Massachusetts. Ca parle de science (un peu) mais surtout du "petit monde" de la science. Et aussi, entre autres, de bouffe, de littérature, de musique, d'actualité, etc. Et de ma vie, pas moins intéressante que celle d'un autre.
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18 septembre 2013 3 18 /09 /septembre /2013 19:19

Je ne sais jamais ce que je dois penser des mails "à tous" de l'administration centrale qui ont pour but d'expliciter une procédure.

 

En effet, j'ignore si je dois me réjouir devant une volonté d'ouverture encore loin d'être systématique de nos jours dans un établissement d'enseignement supérieur, ou sombrer dans la dépression devant la stupidité des dites procédures, tout au moins lorsqu'on les ramène au temps, à l'intelligence et au pognon (le salaire et le QI de certaines personnes impliquées n'étant pas ridicule loin de la) dépensés pour un résultat qui devrait, dans un monde parfait, couler de source.

 

Un exemple ici, vrai bien sûr (où irais-je inventer tout ça), le paiement des heures complémentaires. On pourrait, très naïvement, penser que c'est une procédure tellement courante dans l'ESR qu'elle aurait fini, malgré la nécessité de contrôles (dans une époque pas si lointaine et qui existe encore certainement par endroits, il y a eu quelques dérives spectaculaires des heures complémentaires) par s'automatiser quelque peu.

L'avantage annoncé dans le cas présent est de permettre un paiement 3 mois après la fin de l'année scolaire précédente et non 9 à 10 mois comme auparavant. L'inconvénient, annoncé lui aussi, est que si quelque chose grippe, ce qui est toujours possible voire hautement probable dans un processus à 27 étapes impliquant 12 personnes, "il n'y aura pas de paiement possible en 2014 pour les heures de 2012-2013" (la légalité d'un tel argument d'autorité me semble largement douteuse, mais l'idée est probablement de miser sur le fait, si problème il y a, que 90% s'écraseront et qu'on ne paiera que ceux qui se rebellent).

 

Je mets des guillements car même si j'ai changé beaucoup de choses, le mail reçu était vraiment rédigé comme ça, et insistait sur "l'importance du respect par chacun des échéances."

 

"

Étape 1: du xx au xx 2013 (3 jours, NdeMix) 

Les directeurs de département précertifient les états de service.

Étape 2: le xx 2013 (oui, 1 jour, NdeMix)

Les directeurs d'école certifient.

Étape 3: (le même jour, NdeMix)

L'administration génère les fiches correspondantes, "document officiel" pour la validation des états de service.

Étape 4: (6 jours, NdeMix)

Les enseignants signent leurs fiches. 

Étape 5: du xx au xx 2013 (2 jours, NdeMix) 

Les directeurs de département signent les mêmes fiches.

Étape 6: (1 demi-journée, NdeMix)

Les directeurs d'école signent.      

Étape 7: (1 demi-journée, l'après-midi du même jour, NdeMix)

Le chef d'établissement signe.

Étape 8: (3 jours, nous sommes désormais environ 3 semaines après le début de la procédure, NdeMix)

La DRH et la compta font le boulot pour que tout arrive aux finances publiques et qu'on soit payé dans les temps.

"

 

Il faut tout de même noter que dans l'établissement, on compte quelque chose comme 500 personnels enseignants (EC, ATER, PAST...), beaucoup de vacataires, ainsi qu'un grand nombre de personnels techniques (ingénieurs d'étude ou de recherches) assurant un certain volume horaire de TPs, formations et autres. Chacun a droit à sa petite fiche personnelle, et donc même s'il s'agit d'une signature électronique, le chef d'établissement, quelqu'un de brillant qui a fait une belle carrière et touche un joli salaire, passe une demi-journée à signer quelque chose comme 2000 fiches... J'espère qu'il a des journées plus palpitantes à se mettre sous la dent.

 

Je note également qu'on nous a envoyé, en parralèle, une notice de 9 pages pour expliquer comment assurer le suivi et comptabiliser nos activités d'enseignement pour l'année à venir.

 

Bref, il reste du chemin à accomplir pour le "choc de simplification" cher à Flanby.

 

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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 16:38

Un certain nombre de comportements d'étudiants me sidère ces derniers temps, et je me demande si:

- il s'agit d'un changement de paradigme en cours, sur la conception de l'enseignement, assez profond.

- j'ai beaucoup vieilli et oublié mes années étudiantes.

- il s'agit simplement de hasards successifs, peut-être un peu liés aux modalités particulières de l'établissement où j'enseigne, et pour lesquels il ne faut pas tirer de conclusions hâtives.

 

Récemment, j'ai donc été confronté à un certain nombre d'étudiants que j'ai envie d'appeler "100 balles et 1 mars", qui en gros semblent penser que je suis spécialement et uniquement à leur service*, et qui s'adressent à moi un peu comme un client casse-couilles s'adresse à un serveur au restaurant

Typiquement, des gens qui trouvent parfaitement normal que je réponde aux mails un 23 décembre, pour qui j'ai forcément 1h à passer au téléphone leur expliquer en quoi leur copie est mauvaise, voire (déjà 2 fois cette année) qui me demandent de leur scanner leur copie annotée (quand ce n'est pas en sus celle de leurs camarades), ou de leur faire un corrigé personnalisé. Il y a aussi ceux qui se pointent sans prévenir, à 9h00 comme à 18h30, et qui estiment naturel que j'ai forcément 1h à leur consacrer.

Pour ceux qui trouveraient que je surréagis, je précise que la façon de présenter la demande est souvent un facteur d'irritation autant que le contenu lui-même. Et franchement, je n'ai ni l'intention ni le temps de scanner individuellement 200 copies, sans même poser la question de la légalité du procédé (il me semble qu'on peut exiger de consulter sa copie, mais pas de repartir avec).

 

Je ne pense pas (encore) faire (tout à fait) partie de la confrérie des MCF qui n'ont rien à péter de l'enseignement et des élèves. J'essaie de faire des cours agréables et pas trop magistraux, de faire passer du sens physique, d'aider les élèves (ceux qui sont sympas et bien élevés de bon coeur, et même les autres, de plus mauvaise grâce) quand ils ont des problèmes d'ordre administratif, etc.

Par contre, la recherche reste ce qui fait le plus battre mon coeur, et avec mon salaire mirobolant de 18€ net de l'heure (aux 35h, en temps réél on est plutôt à 13€ net), je refuse de faire le secrétariat en sus du reste, et je refuse d'accepter de ne plus me consacrer du tout à un minimum d'activités stimulantes intellectuellement. J'ai choisi ce boulot pour la liberté qu'il procure, que j'avais largement surestimée comme beaucoup d'entre nous, et donc je ne suis pas prêt à céder le peu qui me reste.   

 

Plus généralement, je m'interroge: les demandes incongrues d'élèves ont elles toujours fait partie du job, sont-elles en augmentation, ou sont-elles liées aux particularismes des enseignements de mon établissement?

Bref, cela peut-il révéler un changement de comportement des étudiants, qui verraient désormais plus dans la formation un produit "commercial" (bien qu'encore presque gratuit), où le client-étudiant serait "roi", et l'enseignant là pour faire ce qu'on lui dit comme on le lui dit.

Cela pose question notamment quant à l'évaluation des enseignements, qui, si elle semble nécessaire, doit être bien pensée: elle se pratique énormément aux US et semble dans les moeurs, donc on peut croire que les étudiants jouent le jeu. Mais cela serait-il vrai chez nous?

J'ai entendu malgré tout plusieurs histoires sur des cours pour lesquels les enseignants sont obligés de jouer les vendeurs de bagnole pour attirer les élèves, a-t-on envie de faire quelque chose de similaire (personnellement, je n'enseigne pas dans des cours où mon ego s'est suffisamment investi pour que j'ai envie d'aller faire l'article de mes enseignements). Que penser alors des cours qui ont de tout temps et quels que soient le niveau ou la façon d'enseigner fait chier tout le monde ou presque, mais qu'il semble néanmoins nécessaire -est-ce vraiment le cas d'ailleurs?- d'avoir vu une fois dans sa vie de façon propre (la thermodynamique ou la physique statistique pour ne prendre que ces exemples)?

 

 

 

* ceci en plus du fait qu'une large majorité des étudiants paraît ignorer la fonction même d'un maître de conférences, notamment la double casquette enseignement et recherche.

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11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 18:35

J'interviens dans un master en cotutelle, l'une des cotutelles gérant plus spécifiquement le M1 et l'un des M2 recherche accessibles, et l'autre plus spécifiquement le M2 Pro, assez bien côté et demandé. 

 

Le responsable du M1 est un collègue probablement très apprécié de l'AERES, qui a tout du "bon enseignant-chercheur moderne": longue liste de publis dans des bons journaux, publications régulières, collaborations internationales, financements et expertises d'"excellence", et implication dans la vie de l'Université voire à l'échelle nationale. 

 

Les responsables du M2 sont au contraire deux collègues aux portes de la retraite, "non-publiants" à vie ou presque, sur qui on a jeté l'opprobre il y a quelques années de façon un peu facile, et donc assez amers sur leurs dernières années.

 

Or, si on discute quelques minutes avec les élèves, on se rend compte que le M1 est un bordel sans nom: emplois du temps improbables voire "illégaux", cours qui sautent sans prévenir, salles inexistantes, programmes d'enseignements inconnus même pour les enseignants, niveau complètement hétéroclite, etc. Et surtout, d'après les étudiants, aucun suivi de la part de l'équipe pédagogique et surtout des responsables de la formation. Alors que le M2 est dans l'ensemble extrêmement bien géré (si les élèves ne trouvent rien à redire, c'est que c'est vraiment bien) avec des débouchés on ne peut plus corrects pour l'époque.

 

Car s'occuper d'un master "correctement", c'est un boulot immense. Il faut faire un emploi du temps cohérent et être réactif face aux impondérables, un programme scientifique qui se tient, être en contact régulier et quasi-individuel avec les élèves d'une part et la scolarité d'autre part. S'occuper des conventions, surtout avec les développements de l'alternance. Récupérer le pognon de la taxe d'apprentissage etc, faire en sorte que les intervenants externes soient payés. Organiser les soutenances, les commissions d'harmonisation des notes, les entretiens d'admission... les tâches sont infinies ou presque*. 

Pour cela, l'établissement donne une décharge d'enseignements royale de 5HED ("tutorer" un apprenti, à savoir aller le visiter 1 fois dans son entreprise et l'appeler 2 fois dans l'année au téléphone - facultatif- compte pour info 8HED). 


Par cette histoire, je veux juste montrer que la notion d'"excellence" et que sa relation à l'enseignement est loin d'être simple.

Il n'y a pas les gentils "non-publiants" exploités d'un côté et les méchants aux dents qui rayent le parquet de l'autre: j'avoue honnêtement, quand nos collègues partiront et que nous, les "jeunes" qui ont l'ambition de passer Prof. un jour (les vieux sont restés MCF toute leur vie) reprendront le flambeau, le M2 ne sera probablement plus aussi doux pour les élèves qu'avant, parce qu'en gros, nos collègues (qui certes n'avaient rien d'autre à foutre ou presque) bossaient, de façon extrêmement consciencieuse, "gratuitement" et que la reconnaissance pour ce travail a été moins que zéro.

Alors qu'il est si simple de faire comme un bon "enseignant-chercheur moderne": mettre dans son CV "responsable de..." et laisser le truc vivoter tant bien que mal pendant qu'on se consacre aux tâches qui comptent vraiment**: ça ne concerne que des élèves après tout, ce n'est pas comme si leur réussite et leur bien-être étaient pris en compte dans les évaluations des enseignants-chercheurs.

 

 

Que l'AERES ait tenté un "recensement" des "non-publiants" (avec des critères pas franchement très contraignants) est plutôt une bonne chose. Encore faut-il savoir quoi en faire et ne pas nécessairement les ostraciser (on en est limite à les "planquer" quand un comité passe, certains envisagent de leur interdire de faire des heures sup'*** etc): l'administration, notamment de l'enseignement, est une activité chronophage et peu stimulante pour beaucoup. Il faudrait la valoriser d'une façon quelconque... pour les enseignants-chercheurs mais aussi pour les élèves.

 

 

*Il y a souvent un secrétariat, mais dont l'efficacité ou la connaissance intime des tâches est mince, et qui n'est donc pas d'une aide énorme.

 

** publis d'une part, participations à des comités théodule de l'autre. Pour le reste "responsable" sur le CV suffit amplement.

 

*** cela a du sens: s'ils font la moitié de leur travail, on ne veut pas les payer pour faire des heures sup' sur le temps de l'autre moitié. c'est aussi débile: dans ce cas, ce sont les publiants qui doivent se taper toutes les heures sup', donc moins publier, etc.

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29 décembre 2012 6 29 /12 /décembre /2012 14:02

Lors du lancement en grande pompe du nouveau logiciel de gestion des heures d'enseignement de l'établissement (usine à gaz qui permettra surtout de continuer à justifier que l'on paye 5 personnes pour vérifier le travail de la 6ème - ce n'est que mon opinion personnelle -), un personnage important nous a annoncé que le budget annuel de l'établissement concernant les heures complémentaires (liées à l'enseignement donc, puisque le but est de contrôler à l'heure près le service des personnels enseignants) était de l'ordre de 8 millions d'euros.

 

Ce chiffre me semble incroyable. D'autant plus après avoir fait un petit "calcul de coin de table" comme on m'a appris à le faire*. 

Un enseignant chercheur doit assurer 192 heures "équivalent TD" (dites HED) annuelles dans le cadre de son service statutaire, soit 50% de son temps, le reste étant consacré à la recherche (travail annuel de 1607 heures, 1HED correspondant à 4,2 heures de travail d'après l'administration, soit 803h de travail pour 192HED). Tout ce qui est effectué en plus (en terme d'enseignement, pas en terme de recherche ou d'administratif) est facturé sous la forme d'heures complémentaires**.

L'heure de TD supplémentaire (que l'on appellera HC comme heure complémentaire) revient un peu plus de 40€ brut à l'enseignant-chercheur. Pour arrondir et faciliter le calcul, disons qu'elle coûte 80€ à l'établissement (ce qui est probablement surestimé)***.

 

Cela implique qu'il y a environ, par an, 100000HC au sein de l'établissement.

 

Dans le cadre de certaines formations (formations continues, stages ponctuels), l'établissement fait appel à des vacataires, conférenciers, professionnels extérieurs académiques ou industriels etc. D'après les chiffres que je connais, j'arrive à environ 5000HC, que je veux bien doubler parce que je ne connais pas tout.

De même, il y a environ 100 à 200 ingénieurs de recherche, d'études ou techniciens qui participent aux activités d'enseignement, et à qui je vais aussi compter pour simplifier le calcul 10000HC.

 

Cela laisse donc 80000HC pour les quelques 500 enseignants-chercheurs (EC) permanents (les ATER ne pouvant bénéficier du paiement d'HC) de l'établissement, ce qui conduit à une moyenne de plus de 150HC par enseignant-chercheur (!).

 

C'est loin d'être le cas dans mon département, qui n'est certes pas le plus surchargé d'enseignements, mais où la moyenne d'HC est, d'après les chiffres que j'ai vus, assez inférieure à 50HC par enseignant. 

 

Alors quelques remarques: soit le chiffre est grossièrement gonflé pour une raison qui m'échappe, soit il est exact.

S'il est exact, soit j'ai fait une grave erreur d'approximation dans mon calcul et je serais heureux qu'on m'en fasse part (même un facteur 2 nous laisse presque 100HC par enseignant en moyenne, et je trouve toujours cela énorme), soit:

- il manque environ 400 EC dans un établissement qui fonctionne avec 500 EC.

- il y a un paquet d'EC qui doivent demander une dérogation (nécessaire si on veut/doit enseigner plus que deux fois son service, soit 384HED), si la moyenne par enseignant est déjà à plus de 150HC. Il me semble que ces dérogations doivent pourtant être exceptionnelles et validées par le "chef suprême" de l'établissement.

- Un EC assure en moyenne, dans l'établissement, presque le double d'enseignement de ce que son service statutaire prévoit. Autant dire que les 50% du temps initialement prévus pour la recherche ne sont qu'un doux rêve. So much for l'"excellence" scientifique et la  qu'on nous assaisonne à toutes les sauces depuis quelques années dans le paysage français du supérieur et la priorité nationale donnée à la recherche.

- quitte à recruter des Enseignants-Chercheurs sur leur dossier scientifique pour ensuite les stériliser en recherche en leur faisant faire presque 2 fois plus de cours que prévu statutairement, autant recruter des Professeurs Agrégés (PRAG) payés pour effectuer 384 heures d'enseignement par an contre 192 pour un EC.

 

 

 

* Réflexe malheureusement étranger à tous les personnels administratifs, qui n'aiment rien tant que pinailler sur des gouttes d'eau quand ils gèrent un océan.

 

** le fait que les HC ne soient pas payées ou alors avec 1 an de retard et plusieurs mois de combat/menaces est une autre question dont je ne parlerai pas ici. Même si on vient de me verser 193€ alors qu'on m'en doit plus de 2000 et que donc j'ai un peu la rabia. On peut également lire ceci pour mesurer mon irritation.

 

*** le problème principal est là, il a été traité par d'autres (par exemple ici): un établissement, même s'il se plaint de payer des HC, a tout intérêt à fonctionner ainsi plutôt qu'à embaucher un EC permanent ou même temporaire. Dans mon statutaire, l'HED coûte 90€ brut à l'établissement, soit plus de deux fois plus que ce que lui coûte une HC (même pour un ATER sous-payé, l'HED coûte environ 60€ brut). 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 16:41
Depuis le début "officiel" des vacances, vendredi à 19h (tellement officiel que l'établissement où j'effectue ma recherche comme celui où j'effectue mon enseignement sont fermés, jusqu'au 2 janvier), j'ai reçu quatre sollicitations, trois émanant d'élèves et une d'un éditeur scientifique. Cela n'a pas l'air énorme, mais c'est largement plus que la moyenne journalière habituelle des quatre mois qui ont précédé (de la part d'élèves et d'éditeurs, hein, pas tout compris)...
 
Si je mets de côté la démarche de l'éditeur scientifique (qui, tout WTF que soit le fait de demander une review le 22 décembre, me laisse la possibilité de jouer la montre, puis d'éventuellement refuser ou au moins quelques semaines pour faire le job si j'accepte) et me concentre sur les demandes des élèves, je trouve que cela révèle beaucoup sur l'image qu'ils ont des enseignants-chercheurs, et plus généralement la façon dont les gens conçoivent la notion de "service": en fait quelqu'un qui serait à leur disposition 24h/24, 7j/7, un domestique en quelque sorte.
Dans le cas des enseignants-chercheurs, homme à tout faire serait le bon mot puisqu'il peut s'agir aussi bien de répondre à des questions de cours que d'aider à résoudre des problèmes administratifs, aider à trouver du boulot, ou que sais-je encore.
 
Ainsi, parmi les 3 sollicitations, l'une me demandait de clarifier des points du cours qui avait eu lieu l'avant-veille (ce à quoi j'ai failli répondre "parfois il faut laisser décanter un peu plus de 48h et on finit par comprendre tout seul"), l'autre me demandait de déplacer une date d'examen parce que l'élève s'est inscrit à deux UEs dont les dates sont incompatibles (chose qui, même si elle était possible - je dois m'assurer de la cohérence des dates au sein de mon équipe, je ne peux pas m'occuper de vérifier tout ce qui se passe dans les autres départements-, ne serait pas de mon fait mais de la responsabilité de la scolarité et du service planification des examens).
Enfin, la troisième me demandait de mettre à disposition des annales corrigées pour l'examen qui a lieu dans plus de 6 semaines. Une fois ceci fait, j'ai ajouté à ma réponse "Nous sommes maintenant le 23 décembre et je souhaiterais profiter quelque peu de mes premières vacances depuis mi-août, merci de votre compréhension".
 
On me répond sur Twitter que j'"overreact" un peu et que je n'ai qu'à pas répondre ou pas lire mes mails, ou bien que les sollicitations n'ont pas nécessairement un caractère urgent. Certes, mais c'est plus subtil que ça. Aujourd'hui on sait très bien que tout le monde ou presque est connecté en permanence*. Quand on fait la démarche d'envoyer un mail à quelqu'un en période de vacances ou même pendant le week-end, on sait très bien, surtout s'il a moins de 40 ans, qu'il y a de grandes chances qu'il ne le lise avant la fin de la période non travaillée susmentionnée.
Psychologiquement, on l'incite donc à prendre sur son temps de repos pour répondre (je ne parle pas ici de tous les mails, on peut bien envoyer des FIY ou autres, mais de mails qui impliquent une action de la part de celui qui le reçoit, demandée par celui qui l'envoit) ou à ce que lui culpabilise s'il attend, comme c'est son bon droit, de le faire sur son temps de travail.
Cette technique très basique est utilisée par de nombreuses hiérarchies pour aliéner leurs cadres en les persuadant qu'ils sont indispensables et par les administratifs de l'enseignement supérieur et de la recherche qui donnent des deadlines le 3 janvier ou le lundi à 7h du matin pour ensuite avoir, eux, 8 mois pour agir tranquillou (cf les appels ANR, par exemple).
 
Bon, je surinterprète effectivement peut-être un peu. Alors, revenons au point basique.
Il me semble que ce n'est juste pas très poli, courtois, bienséant, de solliciter quelqu'un quand on sait pertinemment qu'il est en congés, sauf cas d'extrême urgence. Si urgence il n'y a pas, on attend gentiment qu'il se soit remis de son indigestion et de sa gueule de bois et qu'il ait recommencé le travail.
Dans le même registre, il me semble judicieux de prendre rendez-vous plutôt que de se pointer non annoncé dans le bureau à 18h15 en estimant naturel que l'enseignant-chercheur ait nécessairement 1h à vous consacrer right here right now.
De même qu'on ne rentre pas dans un magasin de prêt-à-porter pour essayer 10 pulls 3 minutes avant la fermeture alors que le vendeur est en train de faire la caisse et a commencé à ranger.
 
Qu'en pensez-vous? (si vous en pensez quelque chose)
 
 
Bon, sinon; ne nous laissons pas abattre, Joyeuses Fêtes quand même et mangez/buvez bien (sans modération) demain et après-demain.
 
 
* Il n'y a guère que quand je pars en vadrouille pendant les vacances d'été qu'il peut m'arriver de ne pas consulter mes mails au moins 1 fois par jour (pas d'internet pendant 5 jours cet été au Kazakhstan, record de l'année). C'est un comportement d'addict que je déplore, mais il existe (et c'est en partie pour ça que je ne veux pas de smartphone, je passe déjà suffisamment de temps comme ça sur Internet).
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29 septembre 2012 6 29 /09 /septembre /2012 14:21

Dans le cadre de mes activités d'enseignement, j'organise 2 ou 3 fois par an des "stages pédagogiques" pour industriels.

 

Ces stages sont payés par des entreprises cherchant à former certains de leurs ingénieurs ou techniciens, à une sous-structure de mon établissement, durent d'un à 10 jours et peuvent aller de thématiques très géralistes à des choses plus spécifiques. 

 

Les stages que j'organise sont plutôt généralistes, le but étant par exemple de présenter plusieurs techniques de caractérisation, avec dans certains cas des démonstrations pratiques, et donc de montrer leur champ d'application dans le domaine de la science des matériaux. L'idée n'est pas d'être exhaustif sur chacune des techniques (il n'y a pas le temps), mais de montrer qu'il existe un "world out there" parce que beaucoup de gens ne connaissent que les techniques présentes dans leurs centres de recherche, pas toujours appropriées pour répondre aux questions qu'ils se posent. Et même s'ils n'ont pas forcément le pouvoir décisionnel d'acheter du matos à 100keuros, de leur montrer que c'est parfois un équipement assez classique en laboratoire et qu'il y a donc peut-être moyen de débloquer des situations.

Mon rôle consiste à définir le contenu du stage, à faire venir un certain nombre d'intervenants "spécialistes" des domaines présentés, et éventuellement à moi-même assurer une ou plusieurs interventions. 

 

Il faut voir que le public est très varié, de technicien niveau bac à ingénieur, d'une personne qui bosse sur les matériaux depuis 15 ans à une personne qui vient de changer de service et n'y connaît quasiment rien... du coup, les attentes sont très variées entre stagiaires et même d'une année sur l'autre... pédagogiquement parlant, contenter tout le monde relève de la mission impossible, et on apprend assez vite à vivre avec des évaluations du stage couvrant tout le spectre de dithyrambique à nul à chier.

 

Cela dit, quelques remarques:

- une bonne partie des stagiaires est persuadée qu'une fois que j'ai dispensé mes 3h de cours, ma journée est finie. Ces personnes sont pourtant souvent passées elles-mêmes par les bancs de l'Université, pour des durées de 2 à 5 ans. Je me dis du coup qu'une immense majorité de la population ignore ce qu'est un enseignant-chercheur et voit en nous des "Profs de fac" similaires à des "Profs du secondaire".

 

- l'autre moitié, celle qui sait qu'a priori je bosse aussi un peu dans un labo de recherche, est persuadée que mon rôle devrait être uniquement de résoudre les problèmes des industriels. Et quand je dis résoudre, je ne dis pas établir un "modèle universel" (dénomination pompeuse mais vous voyez ce que je veux dire) et le leur expliquer, hein, je dis juste leur donner clé en main une solution pratique. Bien sûr, tout cela gratuitement.

 

- la quasi-totalité trouve toujours les cours trop théoriques, malgré les études de cas et les démonstrations. En gros, ils arrivent presque tous avec des questions bien précises, et veulent repartir avec une réponse. Le fait qu'il y ait 10 ou 15 personnes avec des profils et des problématiques différentes et que ce n'est pas le but d'une formation ne semble pas leur sauter aux yeux. Qu'on essaye de leur donner des pistes de réflexion pour qu'ils puissent trouver eux-mêmes la réponse (ou au moins de comprendre leur problème) ne correspond pas à leurs attentes. 

Pourtant, il y a bel et bien une différence entre formation, prestation, et consulting.

Ne serait-ce qu'au niveau des prix demandés... Pour donner un ordre de grandeur, la formation de 4 jours avec 7 ou 8 intervenants coûte grosso modo 1400 euros*, l'ingénieur de mon labo demande ce tarif pour 2 ou 3 jours d'essais où il va fournir les données brutes sans analyse de résultats, et une journée de consulting dans mon domaine peut se négocier à plus de 1000 euros pour quelqu'un d'un peu connu.

 

 

Tout ça pour dire qu'il y a visiblement encore du boulot pour faire comprendre le rôle de l'Université et des universitaires et revaloriser la perception qu'en ont la plupart des acteurs industriels (sans parler du public en général).

 

 

 

 

* Sans vouloir vendre ma soupe (je n'ai rien à y gagner à part des heures de service), les Techniques de l'Ingénieur font par exemple des choses similaires pour 30% plus cher. A cette différence de prix s'ajoute le fait que leurs formations sont assurées par 1 seule personne quand les notres font venir 6 à 10 intervenants "spécialistes" issus du monde académique ou industriel. Ah, bien sûr, ça se passe dans nos locaux et les stagiaires sont très sensibles à leur vétusté, et j'imagine que c'est plus chic là-bas (ah, vous ne saviez pas que l'Université est au bord de la faillite? vous croyiez que les enseignants-chercheurs étaient des pleureuses comme tous les profs?)

 

 

 

PS: Ceci était mon 666ème article.

 

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20 juin 2012 3 20 /06 /juin /2012 15:04

Je donne des cours à des étudiants en 2ème année d'IUT, et également à des étudiants de 2ème année d'école d'ingénieurs.

Ce ne sont pas des établissements de grande renommée, surtout en ce qui concerne l'école d'ingénieurs. Les deux cursus sont "cousins" (à savoir que les cours ont lieu sur le même centre, et qu'un tiers au moins des diplômés de l'IUT poursuit dans l'école d'ingénieurs).

 

Il se trouve que ce sont des cours "d'introduction" sur un sujet qui n'est pas forcément au coeur du diplôme et jamais vraiment abordé avant, donc il y a des similitudes assez fortes entre les deux cours, même si celui d'école d'ingénieurs est un poil plus poussé (ne serait-ce que parce qu'il y a environ deux fois plus d'heures). Bref, ça ne casse pas des briques... 

Le cours est accompagné dans les deux cas d'une douzaine d'heures de travaux pratiques.

 

Eh bien, je m'étonne de constater qu'à tous points de vue, les élèves d'IUT sont meilleurs que les élèves ingénieurs:

- sur le plan "théorique", ce n'est globalement pas fameux, mais on peut plus facilement faire appel à des acquis passés (type "chimie de lycée") pour les élèves d'IUT que les pour les futurs ingénieurs. Il me semble aussi que les bac+2 font preuve d'un peu plus de "curiosité intellectuelle" que leurs grands frères un poil lobotomisés.

- sur le plan pratique, là aussi il n'y a pas photo, les élèves d'IUT étant conformes à leur réputation de "débrouillards", habitués à maniper et à prendre l'initiative facilement une fois qu'on leur a expliqué le truc. Alors que les élèves ingénieurs ont souvent un baobab dans la main, n'écoutent et donc ne mémorisent absolument rien, ce qui fait qu'il faut les surveiller en permanence et leur réexpliquer trois fois les choses les plus simples.

 

 

Quelques bases de réflexion pour expliquer ce qui ne semble pas relever de l'évidence:

- les élèves d'IUT ne sont pas encore complètement blasés par les études.

- (liée à la précédente) les élèves ingénieurs arrivés en 2ème année savent qu'à moins de vraiment abuser, ils auront leur diplôme. On est un peu dans le phénomène de "décompression" que mes profs ont probablement ressenti à mon égard à l'époque où j'étais élève ingénieur et qui est assez général (même si ces élèves là ne sont pas passées par les 3 années un peu abrutissantes et éreintantes de la prépa). Toutefois, les cours d'IUT ont lieu en juin de la 2ème année, donc ces élèves là aussi savent qu'ils iront au bout...

- un phénomène du type "nez dans le guidon" qui frapperait les élèves ingénieurs, les rendant insensibles à tout ce qui ne relève pas de l'"utilitaire immédiat", les élèves d'IUT pouvant encore apprécier d'"apprendre" des choses même s'ils s'imaginent qu'elles ne leur sont pas d'une utilité folle.

- on peut aussi invoquer d'éventuels "effets de compensation" qui deviennent de plus en plus fréquents en écoles d'ingénieurs, qui font que l'élève "moyen" visera le 7 à une matière qui l'emmerde parce qu'il sait que s'il a 14 dans la matière pipot d'à côté, type "soutenance d'émerveillement de la découverte de l'entreprise" ou "notions de management pour le conflit relationnel dans un cadre de travail", et qui n'existeraient pas autant à l'IUT. Il faudrait que je me renseigne... en tout cas il est clair qu'un certain nombre de mes élèves ingénieurs vise le 7 et non plus le 10, ce qui n'améliore pas ma moyenne d'exams...

 

L'an prochain, je croiserai pour la première fois en école d'ingénieurs des élèves que j'aurais eu en IUT: ça sera l'occasion de voir s'ils sont devenus plus nuls avec le temps, et d'affiner mes théories...

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1 mars 2012 4 01 /03 /mars /2012 10:02

Vaste question, à laquelle vous ne trouverez pas de réponse ici.

En même temps, s'il y avait une recette miracle, depuis presque 3000 ans, ça se saurait. 

 

Déjà, on se limitera au cas de l'enseignement supérieur, cadre dans lequel je suis amené à évoluer.

 

Il s'agit plutôt de livrer ici quelques interrogations, réflexions, doute existentiel qui habitent le Maître de Conférences débutant donnant ses premiers cours magistraux alors que sa seule expérience dans le domaine de l'enseignement était jusque là d'avoir assuré un TP "clé en mains" rodé depuis 30 ans...

 

 

- Sur la forme tout d'abord:

 

Comme je pense beaucoup de monde aujourd'hui, j'utilise, pour tous mes cours, un support Powerpoint.

 

Pourtant, je ne considère pas cet outil comme forcément très pédagogique (une critique amusante et pertinente de cet outil dans un article récent du NYT).

J'ai par exemple l'impression qu'il pousse l'enseignant à adopter un ton plus "conférence" que "cours", à savoir qu'il aura plus tendance à vouloir "raconter une histoire" que faire réellement un cours, qui selon moi doit être beaucoup plus structuré et rigoureux.

Par contre, bien utilisé, c'est un outil de commodité qui peut justement aider à la structuration du propos.

 

Pour essayer d'optimiser l'utilisation de cette interface, j'essaie de diminuer au maximum le nombre de slides dans mon cours, et de les compléter par beaucoup de commentaires et notes au tableau.

Alors qu'en conférence ou en séminaire je vais utiliser environ 1 slide pour 1min30 de parole, je vais en cours me servir d'un slide pour 3 à 5min de parole, soit en gros 15 slides pour 1h de cours.

A mon avis, rien n'est moins pédagogique qu'une présentation de 100 slides en 1h, où les informations défilent sans que l'on ne soit capable de ressortir les points marquants, essentiels.

 

Idéalement, je pense qu'il faudrait faire encore moins: car j'ai aussi l'impression que la présentation Powerpoint pousse inconsciemment à présenter, en un cours, beaucoup plus de choses que ce que l'on faisait il y a quelques temps (ou tous ces supports n'existaient pas) et donc beaucoup trop d'informations par rapport à ce qu'un élève moyen est capable d'ingurgiter raisonnablement.

Cela dit, ma prof. de chimie en prépa écrivait tout ce qu'elle disait mot à mot au tableau, à l'époque sans aucun autre support, nous laissant à peine le temps de recopier avant d'effacer, et cela n'était pas non plus une bonne méthode: toute notre concentration était portée sur le fait de parvenir à tout recopier avant qu'elle n'efface le tableau, et en ce qui me concerne, j'aurais tout aussi bien pu recopier un texte en islandais, ça n'aurait rien changé.

 

Aujourd'hui, sans parler de la commodité que j'ai déjà évoquée, je ne sais pas s'il est raisonnable, en tout cas dans la plupart des domaines de la physique et de la chimie, de faire un cours sans support du tout, tant la prise de notes les étudiants tombe en désuétude ("Monsieur, est-ce qu'on aura un poly?" au bout de 17 secondes lors du premier cours est un classique).

 

Mais peut-être faut-il néanmoins réfléchir en ces termes: ne pas montrer plus dans un powerpoint de cours que ce que l'on pourrait écrire au tableau de a à z sans trop se presser.

 

 

 

- Sur le fond:

 

Comme je l'ai dit plus haut, un bon cours doit être à mon goût structuré et rigoureux. 

En tout cas jusqu'à un certain degré d'études (L3, M1?).

Sans des bases solides, la formation scientifique est nulle et non avenue.

 

Cela dit, les cours résultants sont souvent austères, et si un élève de prépa accepte généralement de "bachoter" ou "bourriner" (cette façon de fonctionner étant généralement perçue comme l'essence même de la formation), c'est moins le cas d'autres formations ou passé un certain âge.

On peut remédier un poil à ce cadre formel par le biais de formations très appliquées de type BTS, où les "équations" sont ramenées à "ce qui sert dans la vraie vie", mais le problème est alors que les dites équations sont souvent perçues comme une sorte de "deus ex machina" jamais remis en cause, dont on sait se servir mais qu'on n'a pas vraiment besoin de comprendre.

 

Toutefois, lorsque l'on forme des futurs ingénieurs ou chercheurs, il faut quand même qu'à un moment donné les élèves saisissent la notion de ce qu'est un modèle physique: la notion d'hypothèses, de bornes d'application de ces hypothèses, etc.

En bref, il faut essayer de leur faire prendre un peu de recul: jusque là, on leur a montré les outils, maintenant il faut apprendre à s'en servir de façon autonome.

On passe alors à des explications plus dites "avec les mains", où comment essayer de faire comprendre la physique d'un système sans forcément refaire pas à pas tous les calculs oiseux dont on trouve les résultats dans tous les textbooks (tout en supposant, ce qui est parfois une hypothèse forte, que les étudiants seraient capables de refaire les dits calculs).

C'est un autre type d'enseignements, plutôt réservé à des élèves M2, dernière année d'école d'ingénieurs, voire pour des ingénieurs souhaitant acquérir des connaissances sur un sujet neuf pour eux.

C'est avec ce type d'enseignements que je suis le plus à l'aise, car c'est celui auquel j'ai été confronté quasiment exclusivement lors de mes 4 dernières années en tant qu'élève. Et aussi, ne nous leurrons pas, parce que moi-même, presque 10 ans après, j'aurais parfois un peu de mal à refaire tous les calculs...

Parfois, je me fais donc le reproche de ne pas savoir faire un bon vieux cours "bourrin", avec une démonstration ficelée de a à z d'un problème donné (faites ce que je dis, pas ce que je fais).

 

Pour conclure, que faire quand on se rend compte qu'aucune des deux méthodes n'est bien perçue par les élèves? Quelle serait la troisième voie?

 

Il faut quand même noter que les attentes dépendent fortement du public et donc de la formation dans sa globalité. Et que, le plus souvent, l'enseignant n'est absolument pas informé de ce genre de "détails": d'où viennent les élèves, quelle a été leur dominante, ont-ils des bases de la matière enseignée, attend-on une formation théorique ou au contraire très appliquée, etc.

Pour avoir participé à quelques réunions pédagogiques, il me semble que ces questions sont rarement discutées et que très peu de monde est capable d'y apporter des réponses précises ("quoi, ils ne voient plus ça en L2? Ah merde, c'est pour ça que personne n'a su faire la question 1 de mon exam..."). 

 

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27 février 2012 1 27 /02 /février /2012 12:10

Certaines UEs sont placées chez nous "sous surveillance". Ca n'est pas très engageant et ça veut bien dire ce que ça veut dire: si vous n'avez pas assez d'inscrits, l'UE n'ouvrira pas.

L'idée est comme à la SNCF de rationaliser et de rentabiliser (que ce soit une vision pertinente du service public et de l'Enseignement Supérieur est un autre débat - que l'on nous paye pour assurer un service d'enseignements qui n'ont pas lieu aussi).

 

Toutefois, le calendrier me laisse une fois de plus pantois.

 

Les cours du second semestre reprennent cette semaine.

Pourtant, les inscriptions sont ouvertes jusqu'à mi-mars, et une réunion "au sommet" entre la direction de l'Ecole et la direction de la scolarité aura lieu dans une dizaine de jours pour décider quoi faire des UEs "sous surveillance".

 

Donc, nonobstant le fait que c'est déjà à nous, pauvres cons d'enseignants en première ligne, d'annoncer aux élèves, comme on peut, que finalement le cours auquel ils se sont inscrits n'aura pas lieu, il faudrait en plus assurer "gratos" les trois premiers cours, le temps que la direction se décide, avant de fermer les portes au nez des élèves.

 

Et pendant ce temps là, on m'explique que, huit mois après la fin de l'année scolaire, les papiers pour les heures complémentaires de l'an dernier n'ont toujours pas été envoyés à la comptabilité, et qu'il manque de toute façon une autorisation de je ne sais quel connard de je ne sais quel service pour que ça soit payé.

 

On croit rêver, non?

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23 janvier 2012 1 23 /01 /janvier /2012 11:14

"Juste après la Révolution, Trotski, commandant l'Armée Rouge, a été obligé d'y incorporer des éléments de l'armée impériale, militaires de métier mais "spécialistes bourgeois", comme tels peu sûrs, et il a crée pour les contrôler, contresigner les ordres, les abattre s'ils bronchaient, un corps de commissaires politiques. Ainsi est né le principe de la "double administration", reposant sur l'idée que, pour accomplir une tâche, il faut au moins deux hommes: celui qui l'accomplit et celui qui s'assure qu'il l'accomplit conformément aux principes marxistes-léninistes. De l'armée, ce principe s'est étendu à la société tout entière, et on s'est aperçu au passage qu'il fallait un troisième homme pour surveiller le second, un quatrième pour surveiller le troisième et ainsi de suite."

 

Emmanuel Carrère, Limonov.*

 

 

S'il y a bien une chose qui oeuvre pour le bien de l'Humanité et que le soviétisme nous a léguée, c'est le principe de la "double administration".

 

J'ai déjà tenté d'évoquer l'idée, mais Carrère l'explicite extrêmement clairement en peu de mots.

 

Oh, il y a bien eu quelques concessions à la "sauce démocratique"... 

Le but n'est désormais plus de flinguer les dissidents ou de vérifier la conformité idéologique...

le but s'est un peu perdu d'ailleurs.

A priori, il s'agit de faire respecter des "lois" ou "règlements", mais on se rend compte assez vite que ceux-ci sont fluctuants, souvent mal compris et/ou appliqués surtout selon le bon vouloir du décideur.

 

De façon plus ou moins assumée, le but me semble être d'occuper des gens, qui en ont parfois conscience d'ailleurs, dont on ne saurait que faire sinon, et d'économiser du pognon en retardant au maximum toutes les décisions (on pourrait rétorquer qu'on économiserait encore plus de pognon si on n'avait pas 5 "contrôleurs" pour un "faiseur", mais là n'est pas le propos). 

 

 

Un exemple récent (encore un):

Ici, la double (ou triple) administration n'a pas pour but de contrôler, mais de faire en parallèle des choses dont tout esprit censé estimerait qu'elles devraient être effectuées par un seul et même service.

D'où cacophonie, directives mal accordées et calendriers décalés, et en conséquence délais de réponse ou d'actions décuplés.

 

Nous dispensons des UE à l'échelle nationale (cours assuré principalement par voie informatique).

L'examen est lui aussi à l'échelle nationale: la majorité des élèves le passent sur Paris, mais il y a possibilité de le passer en régions. Il faut que tout cela soit coordonné, ce qui n'est pas simple, et devient même dans le cas présent extrêmement complexe.

 

Il faut d'abord définir la date: pour cela il y a un un service de planification (pas quinquennale, mais pas loin: il nous a fallu un mois pour obtenir une date à peu près cohérente), chapeauté par le service scolarité.

La date est définie en accord avec le service technique et logistique, en charge de l'organisation matérielle des examens et avec le secrétariat pédagogique du département.

L'examen doit être transmis trois semaines à l'avance à la direction générale des services, par le biais d'un serveur intranet, pour être ensuite dispatché sur les serveurs régionaux, qui sont eux gérés par le service technique s'occupant de la plateforme permettant de déposer cours et enregistrements des enseignements à distance.

Les responsables régionaux récupèrent les dossiers et les retransmettent à tous les centres d'une région.

Les responsables locaux récupèrent les dossiers et s'occupent du reste, mais ils ne travaillent qu'à temps partiel, donc il faut être vigilant sur le timing.

Ensuite, il ne reste plus qu'à communiquer (très rapidement, nous dit-on) les notes au bureau des examens (en complétant nous-mêmes les listings parce que souvent, la liste des inscrits à l'UE et la liste des présents à l'examen n'ont pas grand chose à voir).

 

Si ce n'est pas très clair, c'est normal. J'ai essayé de recouper les informations que j'ai reçues de plusieurs services pour expliquer la procédure, mais je ne suis pas sûr d'avoir moi-même tout compris...

Quant à tout ce petit monde, il ne semble pas avoir vocation à communiquer ensemble, et attend le plus souvent que l'enseignant-chercheur au milieu mette les uns et les autres en contact. 

 

 

 

* livre que je viens de commencer et qui me plaît beaucoup, dont le fond (biographie dans laquelle le biographe se met aussi en scène) comme la forme (chapitres courts, réflexions personnelles de l'auteur sur les évènements qu'il raconte, etc) n'est pas sans rappeler HHhH de Laurent Binet.  

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